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Brave new war


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La thèse de J. Robb est simple et ne porte pas que sur l'avenir de la guerre : pour lui c'en est fini de l'état-nation centralisé tel qu'on le connaît aujourd'hui. Il prend l'exemple de ce qui se passe Irak où l'armée la plus puissante du monde n'arrive pas à assurer un semblant d'ordre. Le cas typique est le sabotage d'un pipe line, coût de l'opération 2000 $, dont les répercussions (hausse du prix du pétrole de 8$, 500 millions pour les opérations de réparation) donnent un retour sur investissement inconnu (facteur de plus centaines de milliers). La guérilla serait donc devenue une sorte de guerre économique d'usure : la centralisation, l'aversion du public pour le risque (qui demande donc toujours plus de contrôles, de contrôleurs, qui arrête tout au premier incident etc.), la complexité technologique (ça ne sert à rien de dynamiter une usine : faire un trou dans le bon pipe-line aura autant sinon plus d'effet pour un risque et un coût ridicule) sont autant de points faibles qui retournent la force en faiblesse. D'un autre côté les individus ont de plus en plus de pouvoirs entre leurs mains : les nouvelles technologies lui permettent de se concerter, de voyager, d'accumuler une masse d'informations inédite à ce jour.

De plus, gagner pour la guérilla n'est pas prendre le contrôle du territoire : son but est juste de défaire l'ennemi (économiquement, moralement avec les exactions qui finissent toujours pas apparaître genre abu ghraib) et non de s'y substituer. Ces objectifs flous la renforce : en Irak il y a plus d'une dizaine de groupes largement indépendants et souvent ennemis (sunnites, chiites, baassistes etc.) qui coopèrent sur un mode "open source" à foutre les US dehors. Pour Robb la guerre d'Irak est un laboratoire de cette nouvelle évolution de la guerre tout comme la guerre d'Espagne fut le laboratoire dans lequel on testa certaines théories militaires (frappes aériennes massives).

Je ne sais pas si l'auteur a raison ou non (il me semble un peu trop déterministe dans ses projections) mais sa thèse est très intéressante, en décalage avec le discours des médias sur "la guerre face au terrorisme", elle a aussi un impact d'un point de vue libéral. C'est un exemple concret de lutte entre "l'état" et le "marché", de "combat" entre l'organisation hiérarchisée et la coopération volontaire (non en théorie mais en pratique).

En allant un peu plus loin on peut réfléchir à une solution pour résister à ce type de guérilla. Il semblerait à première vue qu'augmenter la résilience de nos sociétés soit une bonne direction : décentraliser la défense opérationnelle du territoire, dire au revoir aux bataillons de chars et constituer des sortes de milices locales (ce qui pourrait être de bons points de départs pour une guerre civile au passage). Bref, je trouve cet essais très stimulant intellectuellement.

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En allant un peu plus loin on peut réfléchir à une solution pour résister à ce type de guérilla. Il semblerait à première vue qu'augmenter la résilience de nos sociétés soit une bonne direction : décentraliser la défense opérationnelle du territoire, dire au revoir aux bataillons de chars et constituer des sortes de milices locales (ce qui pourrait être de bons points de départs pour une guerre civile au passage). Bref, je trouve cet essais très stimulant intellectuellement.

L'armée de milice helvétique en somme. A ceci près que le blindé a encore toute son importance lorsqu'il est bien pensé. Il suffit de comparer le Merkava IV israélien pensé pour le combat urbain avec notre Leclerc quasiment inutilisable dans cette configuration puisque pensé pour le combat de blindés en plaine façon bataille de Koursk.

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Il suffit de comparer le Merkava IV israélien pensé pour le combat urbain avec notre Leclerc quasiment inutilisable dans cette configuration puisque pensé pour le combat de blindés en plaine façon bataille de Koursk.

Il y a tout de même la version AZUR (Action en Zone URbaine) présentée à Eurosatory 2006 (ce qui est relativement tard en effet par rapport à l'apparition des besoins).

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Je ne sais pas si l'auteur a raison ou non (il me semble un peu trop déterministe dans ses projections) mais sa thèse est très intéressante, en décalage avec le discours des médias sur "la guerre face au terrorisme", elle a aussi un impact d'un point de vue libéral. C'est un exemple concret de lutte entre "l'état" et le "marché", de "combat" entre l'organisation hiérarchisée et la coopération volontaire (non en théorie mais en pratique).

En allant un peu plus loin on peut réfléchir à une solution pour résister à ce type de guérilla. Il semblerait à première vue qu'augmenter la résilience de nos sociétés soit une bonne direction : décentraliser la défense opérationnelle du territoire, dire au revoir aux bataillons de chars et constituer des sortes de milices locales (ce qui pourrait être de bons points de départs pour une guerre civile au passage). Bref, je trouve cet essais très stimulant intellectuellement.

Je trouve aussi cette analyse très intéressante. L'auteur se base peut-être un peu trop sur les pipe-lines qui ont la caractéristique assez rare d'être à la fois difficile à surveiller et d'avoir un impact énorme. Par exemple les voies de chemin de fer sont aussi difficile à surveiller mais d'une part il est relativement rapide et économique de les réparer et d'autre part l'impact économique est limité. Au contraire les sources d'énergie type puits de pétrole, centrale nucléaire ou mines sont assez localisé pour être facile à défendre.

Al-Qaida et les insurgés irakiens sont de bons exemples - bien que politiquement incorrects - d'organisation distribuées. Leurs principales innovations militaires sont les IED faites avec du matériel à faible coût mais la très centralisée industrie de l'armement (notamment américaine) a été relativement rapide à proposer des contre-mesures et la créativités des bricoleurs terroristes a des limites.

De plus, gagner pour la guérilla n'est pas prendre le contrôle du territoire : son but est juste de défaire l'ennemi (économiquement, moralement avec les exactions qui finissent toujours pas apparaître genre abu ghraib) et non de s'y substituer. Ces objectifs flous la renforce : en Irak il y a plus d'une dizaine de groupes largement indépendants et souvent ennemis (sunnites, chiites, baassistes etc.) qui coopèrent sur un mode "open source" à foutre les US dehors. Pour Robb la guerre d'Irak est un laboratoire de cette nouvelle évolution de la guerre tout comme la guerre d'Espagne fut le laboratoire dans lequel on testa certaines théories militaires (frappes aériennes massives).

Il est en effet bon de noter cette différence avec une armée d'occupation ou de libération. Au passage les guerres d'Irak et d'Afghanistan sont aussi des laboratoires pour l'utilisation des drones militaires.

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L'armée de milice helvétique en somme. A ceci près que le blindé a encore toute son importance lorsqu'il est bien pensé. Il suffit de comparer le Merkava IV israélien pensé pour le combat urbain avec notre Leclerc quasiment inutilisable dans cette configuration puisque pensé pour le combat de blindés en plaine façon bataille de Koursk.

Ce qui est surtout intéressant dans le bouquin de Robb est qu'il souligne différents changements de perspectives. Notamment le fait que la guérilla ne vise pas forcément à imposer un "autre ordre" (en cela il y a des différences palpables avec les guérillas type "libération" genre Viet-Nam ou guerre d'Algérie) mais plutôt a vider de sa substance celui existant, et cela à des implications profondes. Par rapport à ta remarque sur le Merkava, il est peut être mieux conçu pour un combat en ville mais de toutes manières une guérilla n'a pas pour objectif d'affronter des armées "régulières" sur de larges champs de bataille.

Pour faire fonctionner une colonne de blindée il faut toute une chaîne logistique (réparations, munitions, fuel etc.) qui implique une chaîne de commandement structurée et une "volonté" de conduire les chars (le moral des troupes pour faire bref). Attaquer les blindés de front est du suicide. En Irak il y a plus de soixante-dix groupes différents qui chacun ont leur motivations propres (souvent antinomiques d'ailleurs) mais qui se synchronisent simplement sur "mettre le plus gros bordel possible". Que ce soit par la prise d'otage, l'attaque de symboles (mosquées), d'infrastructure (pipe-line, lignes électriques) etc. Le résultat est terrible en termes d'efficacité : les investissements internationaux sont nuls (personne ne peut calculer le moindre risque en Irak l'incertitude est trop grande), la reconstruction du pays est une blague et le prix payé par les USA est dément tant en argent que symboliquement : ils ont clairement perdu leur leadership moral et cela à des conséquences incalculables. En gros les militaires US restent bloqués au fond de leurs casernes en Irak font quelques sorties symboliques

=> Même le meilleur char du monde, s'il reste au fond de sa caserne (pour les multiples raisons que j'ai évoqué) ne sert pas à grand chose dans un tel contexte.

De plus dans sa dernière guerre contre le Hezbollah il me semble que ce sont les Kassam (rockets de merde fabriquée avec des boîtes de conserve) plutôt que le Merkava qui ont eu un impact stratégique majeur (alors qu'à un niveau tactique la question ne se pose même pas).

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Al-Qaida et les insurgés irakiens sont de bons exemples - bien que politiquement incorrects - d'organisation distribuées. Leurs principales innovations militaires sont les IED faites avec du matériel à faible coût mais la très centralisée industrie de l'armement (notamment américaine) a été relativement rapide à proposer des contre-mesures et la créativités des bricoleurs terroristes a des limites.

Pour le coup je serais moins optimiste sur la créativité limité des bricoleurs terroristes. Par exemple l'utilisation de sms pour synchroniser une chaîne d'explosion en Thaïlande a réussit à faire écrouler l'approvisionnement électrique de la ville de Narathiwat.

Je pense qu'il existe des centaines de points faibles de ce type. Les télécoms ont l'air plus résilients à ce type d'attaque, il me semble dur d'écrouler le réseau de portable. Mais pour internet la coupure (accidentelle ou intentionnelle ?) d'un cable sous-marin a mis un beau bordel. Je suppose qu'avec un chalutier et des informations on peut monter une opération de faible coût aux répercussions énormes (la réparation a mis une semaine, interruption des marchés financiers etc.). Une fois ça va mais si ça recommence toutes les 3 semaines (ce qui est largement possible a partir du moment où l'opération est facile à financer et mettre en oeuvre) ?

Il est en effet bon de noter cette différence avec une armée d'occupation ou de libération. Au passage les guerres d'Irak et d'Afghanistan sont aussi des laboratoires pour l'utilisation des drones militaires.

Effectivement, la limite que je trouve à l'analyse de Robb est qu'il ne retient que ce qui est en faveur de sa thèse.

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il me semble dur d'écrouler le réseau de portable.

Pourquoi ? Je pense au contraire que quelques bombes bien placées suffisent.

Mais pour internet la coupure (accidentelle ou intentionnelle ?) d'un cable sous-marin a mis un beau bordel.

En fait, ce n'est pas un câble, mais cinq en une dizaine de jours. Du jamais vu. :icon_up:

http://www.geopolitique.com/editorial/de-n…-regards-2.html

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Pourquoi ? Je pense au contraire que quelques bombes bien placées suffisent.

L'expérience des américains au Kosovo montre que ce n'est pas si simple. D'ailleurs l'armée serbe se servait du réseau de téléphone portable pour communiquer, les US ne sont jamais arrivés à vraiment le couper (le réseau est moins performant mais ne s'écroule pas vraiment => il n'y a pas de dynamique type boule de neige comme sur les réseaux électriques, mais je ne suis pas expert c'est juste mon intuition du truc).

En fait, ce n'est pas un câble, mais cinq en une dizaine de jours. Du jamais vu. :icon_up:

http://www.geopolitique.com/editorial/de-n…-regards-2.html

Merci pour le lien : voilà qui apporte sans conteste de l'eau au moulin de Robb.

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D'ailleurs l'armée serbe se servait du réseau de téléphone portable pour communiquer, les US ne sont jamais arrivés à vraiment le couper (le réseau est moins performant mais ne s'écroule pas vraiment

Les Américains s'y sont pris comme des manches. Leurs frappent aériennes n'ont pas dues toucher les quelques équipements vitaux, indispensables au fonctionnement du réseau.

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Une description édifiante de l'impact des Kassam à Sderot est une "bonne" illustration de cette théorie (tout y est l'inégalité entre les coûts/revenus, la destruction progressive de l'économie, le terrorisme vu comme une "taxe" dont le montant devient a terme insupportable, l'impact psychologique lancinant, les armes fabriquées à la main etc.) : http://www.ajn.com.au/news/news.asp?pgID=4741

Israel has stepped up its strikes in recent weeks against Gaza militants, particularly those firing rockets at Israelis and smuggling in weaponry, but the government remains wary of a large-scale invasion of Gaza.

A major incursion could cost Israel heavily in terms of its soldiers’ lives, Palestinian civilian lives and international credibility.

It also would not put an end to the rocket fire, analysts warn.

Exemple supplémentaire d'une armée sans équivalents régionaux mais qui reste à la maison pour raisons stratégiques.

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Mais pour internet la coupure (accidentelle ou intentionnelle ?) d'un cable sous-marin a mis un beau bordel. Je suppose qu'avec un chalutier et des informations on peut monter une opération de faible coût aux répercussions énormes (la réparation a mis une semaine, interruption des marchés financiers etc.). Une fois ça va mais si ça recommence toutes les 3 semaines (ce qui est largement possible a partir du moment où l'opération est facile à financer et mettre en oeuvre) ?

Il semble que certains navires ont été identifiés par satellite. Si ce type d'attaque se développent, les opérateurs trouveront des parades.

En fait, ce n'est pas un câble, mais cinq en une dizaine de jours. Du jamais vu. :icon_up:

Si l'on en croit ce commentaire (non sourcé) de l'article lié plus haut, il y aurait en moyenne 50 câbles cassé par an.

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Si l'on en croit ce commentaire (non sourcé) de l'article lié plus haut, il y aurait en moyenne 50 câbles cassé par an.

La source est

Data from the field

In deep waters, cable cuts are rare. According to one paper presented at last year's SubOptic conference in Baltimore, Maryland, rates of cable fault in water over 1km deep are less than 0.1 faults per year, per 1,000km of installed cable. This implies around 50 deepwater repairs per year, globally. At depths of less than 1km, failure rates hovered between 1-2 per 1,000km in the 1990s, but have been steadily declining. According to a SubOptic 2004 paper, the rate in 2003 was 0.2 fault per 1,000km. This same paper estimated that 60% of all cable cuts occur in waters less than 100 meters deep. Of all cable faults, roughly three-fourths are due to "external aggression," the bulk of which is accidental human activity, namely, fishing, anchors, and dredging; a small portion of the 75% is natural, e.g., from earth movement and chafe, sometimes caused by earthquakes. Equipment failures and unknown - some portion of which could be theft or attempted theft/sabotage - account for the remainder. In deep water, natural causes and/or cable equipment failure dominate; human causes are rare. Hence, when cables fail in deep water, usually a natural and detectable event is the cause, as with the late 2006 earthquake near Taiwan, the last quake to cause multiple simultaneous outages. An earthquake, albeit small (magnitude 4.8) was reported February 2 in the Persian Gulf and could have affected cables there.

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  • 3 weeks later...

Sur le même sujet vous pouvez économiser de l'argent en n'achetant pas "Le nouvel art de la guerre" de G. Challiand. C'est un essais totalement inintéressant, la lecture de la quatrième de couv' en dit tout ce qu'il faut en retenir : c'est le gros caca en Irak (pour simplifier). Le seul élément d'information qu'il apporte, la fixette de Challiand en fait, est la démographie. Il en tire des conclusions quant aux implications stratégiques. Le moins qu'on puisse dire est que c'est très très décevant et ne dépasse pas en qualité le premier article venu dans un quotidien.

"Le nouvel art de la guerrre" est à "Brave New War" ce que Maginot est à Guderian (pour prendre une image parlante du domaine).

Vous comprendrez donc pourquoi je ne met pas de lien amazon vers cette chose.

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