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Délocalisation, Un élément De La Dynamique...


José

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Étude par Gerry Mommaerts (K.U.Leuven), Enrico Pennings (K.U.Leuven), Leo Sleuwaegen (K.U.Leuven), Bart Van den Cruyce et Herman Van Sebroeck Bureau fédéral du Plan, K.U.Leuven et l’UCL :

Le droit, pour une entreprise privée, de décider de ses moyens de production et du lieu de déploiement de son activité est l’un des fondements du système de marché. Dans un monde où l’information est décentralisée, cette liberté de choix contribue sensiblement à l’efficience de la production. La présente étude part de ce principe et ne remet jamais en question cette liberté. Ce principe implique que les pouvoirs publics ne peuvent pas directement intervenir dans une délocalisation, laquelle se définit comme suit: un transfert d’activités (ou d’une partie de celles-ci) à l’étranger organisé par une entreprise belge ou par la société mère (étrangère). Ce concept a fait l’objet d’une approche empirique par le biais, d’une part, de données rassemblées dans le cadre d’une enquête menée auprès de 3.000 entreprises et, d’autre part, de données sur des entreprises ayant procédé à un licenciement collectif. Les données de l’enquête englobent aussi des transferts sans diminution (nette) de l’emploi en Belgique. Quant aux autres données, elles se limitent aux délocalisations avec pertes d’emploi en Belgique.

Si les pouvoirs publics ne peuvent intervenir en interdisant les délocalisations et s’il s’avère encore moins opportun d’ériger toutes sortes de barrières (telles que des limitations d’exportation de capitaux, l’interdiction d’importation, etc.), il importe, le cas échéant, de mieux prévoir les délocalisations afin d’éviter ou du moins de mieux faire face au mécontentement social qui s’ensuit. C’est souhaitable car les délocalisations entraînent des pertes d’emploi, principalement dans l’industrie. Au cours de la période 1990-19951, près de 15.000 emplois, soit 28% des pertes d’emploi dues à un licenciement collectif dans l’industrie, disparaissaient en raison d’une délocalisation. Dans les services, le nombre d’emplois concernés s’élèvait à 2.340, ce qui représente 6% des pertes d’emploi enregistrées à la suite d’un licenciement collectif. Plus récemment, des délocalisations ont eu un grand impact direct sur l’emploi.

En outre, les délocalisations ne sont pas également réparties entre les différents secteurs et entreprises. Elles sont généralisées mais certains secteurs sont plus sévèrement touchés que d’autres, ce qui modifie la structure de l’économie. A l’échelle de l’entreprise, les délocalisations sont plus fréquentes dans les grandes entreprises multinationales, innovatrices et à forte intensité de main-d’oeuvre. La relation avec l’innovation présente un paradoxe intéressant. Nous démontrons que les entreprises innovatrices engrangent, en Belgique, de meilleures performances en matière de croissance d’emploi et (surtout) de croissance de valeur ajoutée. Puisque ces entreprises investissent plus régulièrement à l’étranger, elles transfèrent plus souvent aussi des activités à l’étranger via ce canal. Toutefois, les investissements à l’étranger des entreprises belges ne constituent pas le seul canal de délocalisation. Les délocalisations, telles que celle de Renault Vilvoorde, peuvent également être organisées par des sociétés mères étrangères. De même, les contrats de sous-traitance avec l’étranger donnent souvent lieu à des transferts de production.

On perçoit encore de manière trop unilatérale les délocalisations comme le transfert d’activités vers les pays pauvres parce que le coût de la main-d’oeuvre y est plus avantageux. Il s’agit là d’une image tronquée! La plupart des déplacements d’activités à partir et vers la Belgique se font au départ et à destination d’autres pays de l’UE et - par extension - d’autres pays riches. Outre le coût salarial, d’autres éléments jouent également un grand rôle : l’accès au marché local, les avantages fiscaux ainsi que le know-how. Dans la présente étude, les délocalisations sont explicitement situées dans le cadre élargi de la mondialisation. Celle-ci ne concerne pas uniquement l’intégration croissante des marchés et la croissance des importations et des exportations, elle a également trait à l’internationalisation (l’européanisation) de la production. Dans cette perspective, les délocalisations sont étroitement liées à la réduction ou la cessation d’activités d’établissements décidées par des multinationales. Le but de celles-ci étant de réaliser des économies d’échelle en réduisant le nombre d’établissements avec une production semblable dans différents pays.

L’image ainsi décrite de la délocalisation gagne en pertinence. Parmi les multinationales actives dans l’Espace économique européen, on observe un processus permanent de rationalisation visant à réduire de plus en plus le nombre d’établissements créant la valeur ajoutée. Par conséquent, des établissements situés dans les zones centrales, telles que la Belgique, mais aussi dans d’autres zones périphériques (comme le Sud de l’Italie) disparaissent et l’activité est intensifiée dans d’autres. Si des établissements disparaissent, d’autres viennent s’implanter (dans de nouveaux secteurs ou non) ou peuvent agrandir. C’est certainement le cas dans les zones centrales.

Dans ce jeu, un pays ou une région peut y gagner ou perdre selon que l’implantation, ou la sortie d’entreprises ou encore la réduction de leurs effectifs jouent un rôle prépondérant dans l’emploi ou dans la création de valeur ajoutée. Cette étude se penche sur les facteurs ralentissant la délocalisation (tels que les coûts fixes, l’insécurité, etc.). Une politique visant à inciter les multinationales à procéder à suffisamment de nouveaux investissements est une alternative possible. Il est important que des multinationales réalisent de nouveaux investissements parce que ceux-ci débouchent sur de nouvelles technologies et autres innovations. Plus généralement, l’on estime que les jeunes entreprises (également purement nationales) connaissent une plus forte croissance de la production et de l’emploi. Ce résultat empirique récurrent est corroboré dans la présente étude.

Cette synthèse décrit, en premier lieu, la vision de la délocalisation dans la théorie économique ainsi que les sources de données utilisées pour traiter ce sujet. Le premier résultat présenté, tel qu’il ressort de l’enquête SSTC, concerne les relations empiriques observées entre les délocalisations, les investissements à l’étranger, la sous-traitance à l’étranger et le licenciement collectif. La partie E traite des pays et des motifs des entreprises qui investissent, sous-traitent à l’étranger avec délocalisation. Ensuite sont abordées les conséquences sociales des délocalisations et des licenciements collectifs. La partie G précise le rôle important joué par les multinationales étrangères dans les rationalisations et les délocalisations à destination et au départ de la Belgique. Dans la partie H, on aborde le sujet des déterminants de la délocalisation, de la cessation et de la compression d’activité d’une entreprise, tels qu’ils ressortent de l’analyse économétrique. Enfin, les facteurs déterminant la croissance des entreprises en Belgique sont énumérés dans la partie I. Dans la partie J on formule des conclusions.

Téléchargez le rapport de synthèse (PDF - 244 KB).

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  • 3 weeks later...
  • 2 months later...

Ouf, après vérification, il existait bien un fil de discussion sur les délocalisations.

Rappelez-vous: l'essentiel du débat a proté sur ces fameux centre d'appels, en cours de délocalisation dans les pays d'Afrque du Nord, Maurice, ou Roumanie (bref, chez des pauvres francophones)

On a même asisté à des idées de politiciens tels que "un plan national pour les Call Centers".

Evidemment, ces idiots n'avaient rien compris, et nous autres simples citoyens nous nous sommes fait bluffer.

Centres d'appel : 80% des projets d'outsourcing perdent de l'argent !

Une étude de Gartner vient relativiser l'efficacité des projets de délocalisation des centres d'appel

Par Yves Grandmontagne

La dernière étude de Gartner sur le 'call center outsourcing offshore', la délocalisation des centres d'appel hors des frontières occidentales, pourrait ralentir les ambitions des entreprises en ce domaine.

Première surprise, le mouvement, qui a été engagé au début de ce siècle, reste encore réduit. Il ne devrait concerner que 2% du marché des centres d'appel en 2005, et progresser à 5% en 2007.

Le marché offshore des call center, qui a représenté un chiffre d'affaires de 8,4 milliards de dollars en 2004, devrait atteindre 12,2 milliards en 2007.

Pour le bureau d'études, le principal danger provient d'une méprise : les entreprises s'imaginent qu'elles vont gagner de l'argent en délocalisant certaines fonctions des services à leurs clients.

Il n'en est rien, 80% des projets engagés pour gagner de l'argent vont échouer !

En revanche, pour le Gartner en 2008, 60% des entreprises qui délocalisent des processus de services aux clients vont souffrir de défections de ces derniers, mais aussi de coûts cachés qui vont peser lourdement sur leur capacité à maintenir ces centres.

L'un des principaux problèmes proviendra du turn over, le rythme de renouvellement du personnel. S'il est annuellement de 19% à 25% dans les centres d'appel occidentaux, ce taux atteint dans les centres 'offshore' le taux incroyable de 70% à 80% !

Et comme pour ponctuer ses conclusions, le bureau d'étude affirme que 70% du top 15 des entreprises indiennes qui proposent des services de centres d'appel devraient être vendues, fusionnées, voir marginalisées avant la fin 2005 !

Dans ces conditions, Gartner s'inquiète des effets négatifs de la gestion des centres d'appel délocalisés. Avec seulement 25% à 30% des services proposés qui peuvent être efficaces, le risque est grand de "réduire la qualité de l'expérience du client, diluer les valeurs de sa marque et échouer dans l'objectif de réduire les coûts".

Au moment où de plus en plus d'entreprises européennes envisagent des pratiques d'outsourcing offshore pour leurs centres d'appel, l'étude de Gartner devrait réveiller leur fibre commerciale et les amener à faire preuve de plus de prudence.

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Ouf, après vérification, il existait bien un fil de discussion sur les délocalisations.

Rappelez-vous: l'essentiel du débat a proté sur ces fameux centre d'appels, en cours de délocalisation dans les pays d'Afrque du Nord, Maurice, ou Roumanie (bref, chez des pauvres francophones)

On a même asisté à des idées de politiciens tels que "un plan national pour les Call Centers".

Evidemment, ces idiots n'avaient rien compris, et nous autres simples citoyens nous nous sommes fait bluffer.

Les partisans de l'intervention étatique contre les délocalisations sont loin d'être tous des idiots. Il y a aussi des pseudo-entrepreneurs qui font du chantage à l'emploi ("donnez moi du pognon des aides ou bien je délocalise") soit des politiciens qui veulent se remplir les poches en montant un nouvel "observatoire des délocalisations" ou une "agence pour la promotion de l'emploi local".

La délocalisation réussie est un gain de productivité et profite à tout le monde.

J'ai vu un reportage sur France 2 au cours duquel un journaliste appelle les renseignements de France Telecom, récemment délocalisés au Maghreb, et demande le numéro de téléphone de "France Télévision". Question de l'opérateur: "France avec un s?" Il est évident que le télé-marketing ou la gestion des clients n'est pas si facilement délocalisable que les politiciens voudraient nous le faire croire.

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Les partisans de l'intervention étatique contre les délocalisations sont loin d'être tous des idiots. Il y a aussi des pseudo-entrepreneurs qui font du chantage à l'emploi ("donnez moi du pognon des aides ou bien je délocalise") soit des politiciens qui veulent se remplir les poches en montant un nouvel "observatoire des délocalisations" ou une "agence pour la promotion de l'emploi local".

La délocalisation réussie est un gain de productivité et profite à tout le monde.

J'ai vu un reportage sur France 2 au cours duquel un journaliste appelle les renseignements de France Telecom, récemment délocalisés au Maghreb, et demande le numéro de téléphone de "France Télévision". Question de l'opérateur: "France avec un s?" Il est évident que le télé-marketing ou la gestion des clients n'est pas si facilement délocalisable que les politiciens voudraient nous le faire croire.

Cela illustre deux choses:

- l'obsession des hommes politiques pour l'argent: tout passe par l'argent, si on délocalise, ce n'est par exmple pas pour aller chercher des compétences à l'etranger, non, c'est pour l'argent. C'est bien sur faux, une étude de McKinsey a démontré que la majeure partie des délocalisations sont dues à la disparition en Europe et aux USA de certaines compétences, c'est tout.

- la méconnaissance totale du monde des affaires, cela me fait de plus en plus pitié, car moi je n'ai que 28 ans, je sais que la totalité des hommes politiques racontent n'importe quoi (l'UMP disant quelquechose de différent du PCF, mais dans les deux cas c'est n'importe quoi)

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Cela illustre deux choses:

- l'obsession des hommes politiques pour l'argent: tout passe par l'argent, si on délocalise, ce n'est par exmple pas pour aller chercher des compétences à l'etranger, non, c'est pour l'argent. C'est bien sur faux, une étude de McKinsey a démontré que la majeure partie des délocalisations sont dues à la disparition en Europe et aux USA de certaines compétences, c'est tout.

- la méconnaissance totale du monde des affaires, cela me fait de plus en plus pitié, car moi je n'ai que 28 ans, je sais que la totalité des hommes politiques racontent n'importe quoi (l'UMP disant quelquechose de différent du PCF, mais dans les deux cas c'est n'importe quoi)

Cela dépend de quelles affaires on parle. Ils ne connaissent rien aux affaires honnêtes, mais ils connaissent très bien les "affaires" :icon_up: Le point commun de leurs discours est d'accroître leur pouvoir sur nos affaires.

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  • 2 months later...

Où l'on parle sérieusement de délocalisations, deux articles intéressants, que j'essaierai de commenter plus tard.

Le premier, de JL Levet, commissaire au plan (pas vraiment un ultra liberal libertarien laissez-fairiste), dénonce le mythe.

Derrière les délocalisations, un nouveau mythe…

JEAN-LOUIS LEVET

Tous les dirigeants que nous avons rencontrés au cours de notre mission sur la localisation des entreprises avec pour fil conducteur « Pourquoi des entreprises restent-elles en France ? » (1), sont conscients que les performances de leur entreprise sont fragiles : un environnement où la concurrence est de plus en plus forte, où les « armes » sont inégales (telles que, par exemple, la contrefaçon en provenance d'Asie de façon massive) et où, face à de futurs concurrents asiatiques et sud-américains combinant faible coût du travail et apprentissage rapide, leur recherche d'efficacité productive, de connaissance fine des marchés mondiaux, leur capacité collective de création et leur processus d'innovation seront toujours plus sollicités.

Cependant, la menace qu'ils vivent, pour la plupart, le plus difficilement est celle qui provient de leur environnement le plus proche avec cette nouvelle mode du « tout-délocalisable » : « Nous, chefs d'entreprise, montrons que la délocalisation massive n'est pas une fatalité, alors que notre environnement nous pousse à délocaliser sur un ton à la fois condescendant et ironique, voire compassionnel : «Que faites-vous encore en France», le tout dans un discours dominant actuel axé sur le déclin du pays, peu mobilisateur. »

Trois puissants facteurs participent de cette nouvelle menace :

1. La « pression » mise sur les PMI par les grands donneurs d'ordre : ces derniers demandent à leurs fournisseurs et sous-traitants chaque année des baisses de prix sensibles (ce qu'ils peuvent comprendre), mais de plus formulent expressément à leur encontre la nécessité vitale de délocaliser dans des pays à bas coûts salariaux, sous peine de n'être plus considérés. Ce discours « autoritaire » et très nouveau leur paraît inadmissible, car ils le vivent comme une ingérence dans leur propre pilotage d'entreprise. A cela s'ajoute la généralisation des pratiques d'enchères inversées, y compris dans la grande distribution, qui dégradent sérieusement les liens de confiance entre partenaires commerciaux : ces pratiques choquent d'autant plus les PME que les groupes publics ont aussi recours à ce système (EDF, France Télécom…) ; de même, les marchés publics sont souvent très focalisés sur les prix, au détriment de la prise en compte de la qualité et de l'emploi local.

2. Des investisseurs institutionnels et les opérateurs des marchés financiers tiennent un discours justifiant la délocalisation et s'étonnent auprès de certains des dirigeants de leur rattachement à leur territoire et les encouragent à fermer leurs usines de production, et à recourir à l'externalisation auprès d'opérateurs asiatiques. Or ces dirigeants estiment qu'« aller chercher des marges de rentabilité financière à tout prix mettrait en danger la cohésion de l'entreprise et donc à terme sa pérennité ».

3. Un nombre croissant de grands groupes par leurs pratiques favorisent ce climat du « tout-délocalisable » : l'externalisation dans les pays lointains de fonctions entières se traduit de fait par de la délocalisation et des pertes d'emplois et de savoir-faire dans le pays d'origine : certains grands cabinets d'audit sollicités par des grands groupes industriels et de service dénoncent - un comble - « l'illusion de l'offshore (2). Ils démontrent que si l'on applique un calcul économique véritable, cette décision ne se justifie pas. Mais la mode est là : pour séduire les marchés financiers, il faut désormais avoir dans son plan de développement, « ses Indiens et ses Chinois » : la réduction des coûts comme seule finalité devient un « must » incontournable du bon gestionnaire moderne et responsable (responsable devant les marchés financiers, bien entendu).

Par rapport à ces pratiques, que d'hypocrisie de la part de ces acteurs : des grands acheteurs (privés et publics) qui développent un discours de plus en plus structuré sur leur « responsabilité sociale » et une communication sur leur prise en compte du « développement durable » ; une grande distribution qui justifie ses pratiques par le souci de fournir aux consommateurs (en oubliant qu'ils sont aussi salariés) des prix les plus bas possibles pour combattre la « vie chère » ; les financiers expliquant aux PMI combien la Bourse peut leur apporter en autonomie financière et en notoriété…

Les chefs d'entreprise que nous avons rencontrés ont tous mis l'accent sur la nécessité à l'échelle européenne de promouvoir des politiques de croissance, alliées à une politique de change cherchant à rééquilibrer la parité euro/dollar et une harmonisation fiscale et sociale ; de même, à l'échelle nationale, l'action de l'Etat, qui priviliégie traditionnellement les deux extrémités du système productif - la création d'entreprise et l'aide aux grands groupes - doit se recentrer sur les PMI et réinvestir sa fonction essentielle : celle de l'anticipation au service du pouvoir faire ensemble.

JEAN-LOUIS LEVET est chargé de mission auprès du commissaire au Plan

(1) Rapport de mission :J.L. Levet, « Localisationdes entreprises et rôle de l'Etat :une contribution au débat », Commissariat général du Plan, Les Cahiers, avril 2005.(2) Unilog/IDC « Outsourcing : mythe de l'offshore et réalitéde l'externalisation des systèmes d'information », 2004.

 

Le second, d'une chercheuse de l'IFRI, explique ce qu'est réellement une délocalisation, je trouve l'explication simple et concise.

… ou la mutation du système productif

FRÉDÉRIQUE SACHWALD

Les délocalisations sont souvent considérées comme des facteurs de désindustrialisation inquiétants alors qu'elles s'inscrivent dans l'évolution des économies avancées vers des activités plus productives. Ce paradoxe s'explique par la forte visibilité des délocalisations et la faible visibilité de leurs effets positifs sur l'économie. L'arbre des délocalisations tend ainsi à cacher la forêt de la mutation des systèmes productifs des pays industriels.

Le débat public est d'abord influencé par la forte visibilité des délocalisations. L'entreprise qui délocalise transfère la production d'un bien, de composants ou d'un service dans un pays où les coûts sont plus faibles. Elle ferme une usine et en ouvre une autre à l'étranger pour optimiser ses coûts, d'où l'impression qu'elle pourrait être incitée à revenir sur sa décision. Les pertes d'emplois dues aux délocalisations dans les pays à bas salaires sont par ailleurs concentrées sur les secteurs et les régions qui emploient une proportion importante de salariés peu qualifiés. La visibilité des délocalisations a incité les observateurs à étendre la notion, qui est devenue un bouc émissaire de l'accroissement du chômage. Certains considèrent l'ensemble des investissements dans les pays émergents comme des délocalisations, alors que l'attractivité de ces pays s'explique largement par le dynamisme de leur marché local. La sous-traitance internationale, qui ne suppose pas d'investissement, voire l'accroissement des importations en provenance des pays émergents est aussi parfois considéré comme un indicateur des délocalisations. Cette extension à l'ensemble des échanges avec les pays à bas salaires revient à contester le développement de ces échanges, sans contribuer à résoudre le problème sous-jacent du chômage. De nombreuses études ont en effet montré que les importations en provenance des pays à bas salaires n'expliquent qu'une part modeste des pertes d'emplois non qualifiés, largement dues au progrès technique et à la concurrence par l'innovation. Autrement dit, les délocalisations sont une des manifestations de la mutation des systèmes productifs et non le déterminant unique des difficultés rencontrées par les personnes les moins qualifiées.

La faible visibilité des effets positifs des délocalisations joue un rôle tout aussi important dans le débat public. Les effets négatifs des délocalisations sur l'emploi sont directs et immédiats, alors que les effets positifs sont plus diffus et plus lents à se manifester. Les consommateurs bénéficient de la baisse des prix des produits due à leur fabrication - totale ou partielle - dans des pays à bas salaires. Cette baisse représente un accroissement du pouvoir d'achat, qui peut susciter des dépenses sur d'autres postes. La baisse des prix peut aussi avoir des effets positifs pour le système productif. Aux Etats-Unis, dans les années 1990, la baisse des prix des produits informatiques importés a stimulé l'équipement des entreprises, avec un impact positif sur la productivité et la croissance. La croissance actuelle des importations de services pourrait aussi stimuler la productivité américaine, comme le suggère le cas des services informatiques : au début de la décennie 2000, les pertes d'emplois de programmeurs ont été compensées par la création d'emplois plus qualifiés, tels que des postes d'ingénieurs systèmes. Les analyses sont moins nombreuses pour les pays européens, mais le processus de destruction d'emplois (peu qualifiés) et de création d'emplois (plus qualifiés) y semble souvent moins dynamique.

L'enjeu pour les politiques publiques n'est donc pas de défendre les activités menacées par la concurrence des pays à bas salaires en l'état. Il s'agit plutôt d'analyser comment la France pourrait tirer parti de la mutation du système productif. Deux phénomènes doivent être mieux étudiés pour prévoir la redistribution, sectorielle et géographique, des activités et les conséquences sur l'emploi. D'une part, l'intégration croissante entre les activités industrielles et les services. Une meilleure connaissance du rôle des services aux entreprises industrielles pourrait nous amener à réviser notre évaluation de la désindustrialisation. Elle permettrait aussi de souligner l'importance de l'innovation dans les services. D'autre part, l'analyse de la dynamique des réseaux mondiaux de production et d'innovation permettrait de mieux comprendre les facteurs de compétitivité des entreprises et d'attractivité des territoires.

FRÉDÉRIQUE SACHWALD est responsable des études économiques à l'Ifri.

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pour le prix d'une minute de labeur d'un ouvrier belge, l'ouvrier chinois bosse pendant une heure.

A mon avis pour les secteurs ou la main d'oeuvre est importante (confection de vetement par exemple) la delocalisation est une bonne solution pour renforcer sa competitivite.

Cependant, la France a la chance d'avoir des secteurs industriels fortement automatises. Ainsi bon nombre de boite n'ont aucun interet a partir. Ou bien ne delocalise que partielement leur activite.

…Du moins tous ca c'est mon avis.

Peut etre pourrions nous delocaliser l'assemblee ou le senat?

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