Aller au contenu

Charte De L'environnement Et Droit De Propriété


Chitah

Messages recommandés

Article sur un cas juridique que j'ai trouvé extrêmement intéressant, lisez-le il en vaut la peine!

Charte de l'environnement et droit de propriété

En relaxant les « faucheurs volontaires », le tribunal correctionnel d'Orléans a peut-être fait prévaloir un droit de propriété virtuel, celui de toute personne sur l'environnement, patrimoine commun de l'humanité.

DOMINIQUE ROUSSEAU (*)

Publicité

Par son jugement du 9 décembre 2005 relaxant les « faucheurs volontaires » qui avaient détruit les essais d'OGM en plein champ réalisés par la société Monsanto, le tribunal correctionnel d'Orléans invite à reprendre la réflexion sur le droit de propriété. Ce dernier trouve un fondement constitutionnel incontestable dans l'article 2 de la Déclaration de 1789 qui énonce que « le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme ; ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression ».

Sans remettre en cause la valeur de ce droit, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 25 juillet 1989 (1), en a cependant précisé la portée contemporaine : « postérieurement à 1789 et jusqu'à nos jours, les finalités et les conditions d'exercice du droit de propriété ont subi une évolution caractérisée par des limitations exigées par l'intérêt général ; que c'est en fonction de cette évolution que doit s'entendre la réaffirmation par le préambule de la Constitution de 1958 de la valeur constitutionnelle du droit de propriété ».

Depuis cette décision, l'évolution s'est poursuivie par la volonté même du constituant qui, en intégrant la Charte de l'environnement dans la Loi fondamentale, a non seulement soumis l'exercice du droit de propriété à de nouvelles finalités et conditions, mais encore lui a donné une base constitutionnelle concurrente à celle de la Déclaration de 1789. Considérant, en effet, que « l'environnement est le patrimoine commun des êtres humains et que la préservation de l'environnement doit être recherchée au même titre que les autres intérêts fondamentaux de la Nation », la Charte proclame, en son article 2, que « toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l'amélioration de l'environnement ».

Ne pas gêner l'usage

Dès lors, en relaxant les « faucheurs volontaires », le tribunal correctionnel d'Orléans n'aurait-il pas simplement tiré les conséquences de ce nouveau devoir juridique mis à la charge de « toute personne » ? Sans doute une autre lecture est-elle possible : le tribunal n'aurait-il pas fait prévaloir un droit de propriété virtuel, celui de toute personne sur l'environnement, patrimoine commun de l'humanité, sur un droit de propriété réel, celui de la société Mosanto ? Cette lecture ne peut convaincre que si est acceptée la première branche de l'affirmation ; or, sur la plan du droit positif, rien ne permet de soutenir la virtualité du droit de propriété sur l'environnement.

Les juristes distinguent généralement la « res nullius » et la « res communis ». La première est un bien ou une chose quelconque qui, appartenant à tous, ne peut faire l'objet d'aucune appropriation, ni par une personne privée, ni par une personne morale. La seconde est également un bien ou une chose quelconque qui n'appartient à personne et dont l'usage est commun à tous, mais qui n'exclut pas la possibilité d'une appropriation.

Parlant des choses qui relèvent de la « res communis », Henri, Léon et Jean Mazeaud écrivent en effet : « On en conclut généralement que ces choses ne sont pas susceptibles d'appropriation ; c'est inexact. La personne qui boit l'eau du torrent, ou la fait boire à son bétail, l'industriel qui fabrique de l'air liquide, font actes de propriétaires ; mais cette appropriation ne doit pas gêner l'usage de tous sur ces choses ; cette limite apportée aux droits de chacun dans l'intérêt de tous est la caractéristique des choses communes, celle que soulignaient déjà les Romains » (2).

Le reflet de la société

Par son jugement, le tribunal d'Orléans a ainsi considéré que l'environnement était une « res communis » et qu'en conséquence les « faucheurs volontaires » avaient fait un acte de propriétaires sur l'environnement afin de défendre, conformément à la charte, la diversité biologique et ceci dans l'intérêt de tous. En d'autres termes, les juges n'ont pas fait prévaloir un droit de propriété « virtuel » sur un droit de propriété « réel » : ils ont, comme c'est leur fonction, pris en charge les droits de deux propriétaires, celui de la société Mosanto sur ses champs et celui des « faucheurs volontaires » en faveur de la préservation de l'environnement. Et, selon une jurisprudence constante du Conseil constitutionnel, de la Cour de cassation et du Conseil d'Etat, ils ont jugé que celui des deux droits qui était fondé sur la défense de l'intérêt général pouvait, en l'espèce, l'emporter sur celui qui relevait seulement de la défense d'intérêts commerciaux.

Et ils l'ont fait explicitement, « en considération de l'évolution constitutionnelle et internationale du droit positif, reflet de la société ». Ce que ne peut qu'approuver la Cour de cassation toujours soucieuse de voir les juges prendre dûment en compte ces évolutions - voir l'exemple de la délégation de l'autorité parentale à un couple homosexuel.

(*) Professeur à l'universitéde Montpellier-I, membre de l'Institut universitaire de France.(1) CC 89-256 DC,25 juillet 1989, R. p. 53.(2) Henri, Léon et Jean Mazeaud, « Leçons de droit civil », Montchrestien, 1972, tome 1, p. 254-255.

Lien vers le commentaire
Sans remettre en cause la valeur de ce droit, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 25 juillet 1989 (1), en a cependant précisé la portée contemporaine : « postérieurement à 1789 et jusqu'à nos jours, les finalités et les conditions d'exercice du droit de propriété ont subi une évolution caractérisée par des limitations exigées par l'intérêt général ; que c'est en fonction de cette évolution que doit s'entendre la réaffirmation par le préambule de la Constitution de 1958 de la valeur constitutionnelle du droit de propriété ».

Bienvenue dans le règne de l'arbitraire. Qui est aujourd'hui apte à définir l'intérêt général ? Cette formule ne signifie rien et permet n'importe quoi, comme nous le montre cet article.

Si je comprends bien, n'importe quel con faisant n'importe quoi n'importe où a le droit d'agir de la sorte, pourvu qu'il se réclame de la "protection de l'environnement" ?

Lien vers le commentaire
Bienvenue dans le règne de l'arbitraire.

Oui et surtout l'auteur a beaucoup de mal a expliquer la décision du tribunal. Pour cela, il doit inventer une notion nouvelle, "la propriété virtuelle", concept qui démolit la signification même de la propriété et par conséquent nie la liberté.

Lien vers le commentaire

De la mauvaise foi comme ça, ça me met hors de moi …

Encore un juriste fanatique de l'environnement qui tend à promouvoir nimporte quoi pour défendre son petit idéal personnel …

Malheureusement ils sont légion et manipulent le droit avec le prestige que leur petite réputation de profs leur donnent. (Je sais de quoi je parle, j'ai fait un DES en droit de l'environnement). Ce qui est cocasse, c'est que certains spécialistes du principe de précaution (je pense notamment à Olivier Godard) sont également très virulents à leur égard. :icon_up::doigt:

Lien vers le commentaire
Invité Arn0

Si il aurait voulu justifier le fauchage volontaire au nom du droit de propriété il disposait d'un système de défense plus habile. Genre : puisque les champs OGMs contaminent de leurs semences les champs voisin traditionnel c'est une violation de droit de droit de propriété donc les faucheurs volontaire étaient en situation de légitime défense (au passage la légitime défense marche même lors de la défense de tiers). L’argument que les champs traditionnel contaminent aussi les champs OGMs des voisins ne tenant pas à cause du principe du premier arrivant.

:icon_up:

Lien vers le commentaire
Invité jabial

Seul le propriétaire du camp contaminé peut (déléguer le droit de) faucher alors, et encore faut-il qu'il prouve la contamination.

Lien vers le commentaire
  • 1 month later...

http://permanent.nouvelobs.com/societe/200…P5549.html?1346

Orléans: des peines de deux mois de prison ferme et de deux mois avec sursis pour les faucheurs d'0GM

La cour d'appel d'Orléans (Loiret) a prononcé mardi des peines de deux mois d'emprisonnement ferme et de deux mois avec sursis contre les 49 faucheurs volontaires qui avaient détruit deux parcelles de maïs exploitées par la multinationale américaine Monsanto dans le Loiret à Grenneville-en-Beauce le 14 août 2004 et à Neuville-aux-Bois le 7 juillet 2005.

Jean-Emile Sanchez, ancien porte-parole de la Confédération paysanne, a été condamné à deux mois de prison ferme, car il avait déjà été condamné avec José Bové pour le démontage du MacDonald's à Milau en 1999 et pour la neutralisation d'un essai de maïs transgénique dans le Gers en 2002.

Les 48 autres prévenus ont été condamnés à de la prison avec sursis. Les 49 prévenus ont par ailleurs été condamnés chacun à 1.000 euros d'amende. Olivier Keller, secrétaire national de la Confédération paysanne, a déjà fait savoir que les 49 faucheurs volontaires feraient appel de ces décisions devant la Cour de cassation.

Dans un communiqué, Monsanto France a dit se féliciter de cette décision "qui fait appliquer le droit, protégeant ainsi les propriétés des agriculteurs et les expérimentations autorisées et contrôlées méticuleusement dans un cadre réglementaire extrêmement exigeant"

Maitre Eolas, que l'on ne presente plus, revient sur les details légaux (il avait anticipé que l'appel verrait une condamnation des faucheurs).

Notez qu'il a du fermer les commentaires suite à une invasion de "trolls bios" comme il les appelle…

http://maitre.eolas.free.fr/journal/index….at-de-necessite

Lien vers le commentaire

Archivé

Ce sujet est désormais archivé et ne peut plus recevoir de nouvelles réponses.

×
×
  • Créer...