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Privatiser les rues


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Le cas pour la privatisation des rues

L’économiste Hernando de Soto lie la pauvreté dans les pays pauvres à ce qu’il appelle le capital mort. En effet, les pauvres des pays pauvres possèdent du capital mais ne peuvent pas le valoriser à cause d’un environnement légal défavorable (en gros des droits de propriété mal définis). Si cela est assez criant dans les pays pauvres (pensez bidonvilles ou champs communs) c’est cependant aussi le cas dans les pays riches, en particulier là où l’État est obèse. De nombreuses restrictions gênent l’utilisation du capital dans ces pays, ou pire, celui-ci est plus ou moins la propriété de l’État. On peut citer les forêts publiques, les pêcheries, les infrastructures de transport, les participations dans des entreprises etc. Je vais parler ici d’un point qui me semble peu couvert : les rues des villes. Par rue j’entends ici les voies destinées à la circulation piétonne et automobile et généralement bordées d’immeubles.

Les bénéfices :

Le bénéfice le plus évident est une meilleure gestion du stationnement. Actuellement, la tarification du stationnement est décidé par les mairies et bien loin d’une tarification optimale permettant de tendre vers l’équilibre entre l’offre de places de stationnement et la demande pour celles-ci. Qui n’a jamais tourné en rond plusieurs minutes pour trouver à se garer pour ensuite marcher à nouveau quelques minutes car éloigné de sa destination finale ? La technologie permet aujourd’hui d’avoir une tarification flexible en fonction de l’heure et du temps de stationnement et d’adapter ceux-ci aux besoins des propriétaires-riverains, en fonction de leur spécificité (commerçants ou résidents par exemple). Une tarification efficace permettrait aussi d’augmenter la capacité du parc de places de stationnement en optimisant son utilisation : en pouvant se garer à proximité de sa destination finale, les temps de trajet hors du véhicule sont réduits ce qui permet d’utiliser la place moins longtemps. De même, comme il est plus facile de trouver une place, les conducteurs ne vont pas hésiter à en changer là où ils restent parfois garés au même endroit toute la journée et ainsi vont augmenter la rotation des places. Plus de facilité à stationner c’est aussi moins d’essence et de temps perdus à tourner en rond, moins de gens qui circulent inutilement et moins de pollution. A titre indicatif, le stationnement de rue à Paris représente 120 millions d’euros de recettes pour la ville.

Les rues privées permettraient l’essor d’une activité aujourd’hui revenue à la mode : les camions de rue. Ce sont les propriétaires-riverains qui décideraient quel camion peut occuper leur rue, sous quelles conditions et à quel prix. Ils pourraient ainsi arbitrer entre le besoin pour ces commerces et le besoin en places de stationnement. Cela pourrait permettre aux zones relativement dépourvues de commerce de s’en procurer. Les propriétaires de camions ne seraient, eux, plus dépendant de l’arbitraire de la mairie. Cela marcherait de la même façon pour les kiosques.

Dans le même esprit que les camions, la privatisation des rues permettrait la régulation de toutes les activités à la sauvette : vendeurs de Tour Eiffel, joueurs de bonneteau, artistes de rue... Les propriétaires-riverains licencieraient les commerçants de leur choix ce qui leur permettrait de les contrôler et de se débarrasser de ceux qui sont éventuellement des pickpockets. Les vendeurs gagneraient en sécurité juridique vu que leur commerce deviendrait légal et seraient les principaux alliés pour se débarrasser des éventuels délinquants : les vendeurs qui auront payé une licence verront en effet d’un mauvais œil des vendeurs clandestins/sans licence venir prendre leurs parts de marché.

Enfin, les propriétaires-riverains décideraient eux-mêmes des règles de la publicité de rue et pourront arbitrer entre panneaux publicitaires et éventuelle perte de valeur de leur bien immobilier. Ils seraient aussi responsable de l’arbitrage entre arrêt de bus, station d’auto-partage ou de vélo et places de stationnement. Il n’est pas impossible que les compagnies de bus se mettent à payer les riverains pour compenser la perte en place de stationnement tout en gardant à l’esprit qu’être à proximité d’un arrêt de bus peut faire augmenter la valeur des biens des riverains et que les endroits où le stationnement auto sera le plus demandé seront probablement les endroits où les arrêts de bus seront les plus rentables.

Les coûts :

Comme il n’y a pas de repas gratuit, ces bénéfices sont associés d’une certaine série de coûts. Ceux-ci sont tout sauf insurmontables et gagneraient à être pris en charge par le privé.

Le premier coût qui vient à l’esprit c’est l’entretien des rues. Les habitants contribuables gagneraient à voir cet entretien passer directement dans leurs mains. Les rues seraient probablement réparées plus rapidement et pour moins cher (le copinage entre collectivités territoriales et artisans du BTP est légendaire).

Le second coût est l’éclairage public. De vrais propriétaires n’auraient pas intérêt à éclairer lorsqu’il fait jour et peut-être même aucun intérêt à éclairer les coins tout à fait tranquille où très peu de gens circulent la nuit. Cela permettrait aussi d’adopter plus rapidement les innovations et de rénover un éclairage public vétuste. La technologie LED et les détecteurs de présence offre des possibilités importante de réduction des coûts d’éclairage (d’autant plus qu’à l’extérieur, la chaleur dégagée par l’ampoule n’a aucun intérêt).

Le troisième coût qu’il serait bon de voir gérer par les propriétaires-riverains est le nettoyage. Cela permettrait non seulement de se séparer d’un certain nombre de fonctionnaires municipaux mais aussi d’avoir enfin des rues propres.

La dernière source de coût c’est le mobilier urbain. Cependant, là aussi il n’y a pas de problème particulier : il peut s’autofinancer par la publicité (c’est le business JC Decaux) et être éventuellement une source de valeur pour les biens immobiliers environnement.

La méthode :

La méthode pour privatiser me semble assez simple. Les propriétaires des rues seraient in fine les propriétaires des biens immobiliers attenants. La propriété de la rue elle-même reviendrait à une société dont les actionnaires seraient les personnes mentionnées précédemment. S’il est important que le premier découpage du réseau entre sociétés soit le meilleur possible, il est encore plus important que la forme juridique de ces sociétés soit la plus flexible possible pour permettre par la suite aux propriétaires de leur donner la forme qui leur convient le mieux et qu’ils puissent redécouper le réseau de façon optimale en divisant ou en regroupant ce qui doit l’être. La propriété serait bien entendu gracieusement cédée par la mairie.

Quid de la circulation ? La règle serait la même qu’aujourd’hui : sauf mention contraire, la circulation est réputée libre.

Un dernier point :

Les rues privées protégeraient les riverains des évènements "festifs" qu’on leur impose, par exemple lorsque la mairie décide de fermer arbitrairement une rue à la circulation. Cela leur permettrait de gérer ce qui se passe dans leur rue selon leur intérêt et d’investir en conséquence. Ils seraient aussi protégés des « embellissements » imposés. Par contre, les aménagements de sécurité routière leur reviendrait, ce qui laisserait cependant la place à l'innovation.

Conclusion :

La privatisation des rues permettrait d’avoir des villes plus agréables à vivre, plus propres, moins congestionnées et plus économiques. Cela permettrait de valoriser au mieux un capital sous exploité et mal géré.

  • Yea 2
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Pour le coup oui c'est plutôt un débat utile la privatisation des routes, surtout que ce que j'ai lu avec Friedman est loin d'être satisfaisant.

On est en France voyons, on ne débat que des muzz, du code du travail et de the island. On est pragmatique sur tous les sujets et ce qui se passe ailleurs en Europe et dans le monde ça n'existe pas, comme par exemple le fait que les 2/3 du réseau routier suédois sont privés.
  • Yea 1
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Blague à part, je ne sais pas s'il est possible de privatiser l'ensemble du réseau routier, mais c'est certain que chaque type de route devra être privatisé d'une manière différente (rues de quartier, rues en ville, routes et chemins communaux, départementales, nationales, voies express, autoroutes). Certaines privatisations sont plus difficiles à mener mais pas infaisables (je pense à certaines départementales).

Par contre les bénéfices de privatiser les rues en terme de sécurité, circulation et architecture sont évidents.

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Blague à part, je ne sais pas s'il est possible de privatiser l'ensemble du réseau routier, mais c'est certain que chaque type de route devra être privatisé d'une manière différente (rues de quartier, rues en ville, routes et chemins communaux, départementales, nationales, voies express, autoroutes). Certaines privatisations sont plus difficiles à mener mais pas infaisables (je pense à certaines départementales).

Par contre les bénéfices de privatiser les rues en terme de sécurité, circulation et architecture sont évidents.

 

c'est la faute aux musulmans

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Le but est de trouver une robinsonade qui mette ton plan par terre :P ?

 

Pour être plus constructif, il me semble que tu oublies un coût majeur dans ta description : l'administratif et la prise de décision. Selon moi, ça devrait faire augmenter drastiquement la taille de l'unité citadine minimale (et puis on voit déjà assez la gueule de la mamie du syndic sans vouloir se la farcir au conseil de rue) vers un truc qui s'approcherait des arrondissements actuels.

Enfin, comme toujours, l'important, c'est la possibilité de sécession :D.

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C'est pour ça que je dis que la forme de la société doit être assez flexible pour permettre les regroupements et les éventuelles divisions. Ou sans te regrouper, tu peux déléguer entièrement la gestion à une société tierce qui aurait aussi pour client les quartiers voisins ou ailleurs. Quand je dis rue, ce ne sont pas forcément les rues individuelles. Quand tu habites à la campagne, la question du stationnement et de l'éclairage ne se pose même pas forcément.

S'il n'y a pas de contraintes réglementaires particulières, la gestion peut être très simple. C'est 3 lampadaires, 2 parcmètres et deux-trois réparations de temps en temps. Un type motivé peut meme le faire tout seul si la taille est petite.

Imaginons que ce soit des sociétés par action : à la première réparation, tu fais une levée de fond. Ceux qui participent récupèrent la majorité du capital et ceux qui s'en foutent n'ont plus à se préoccuper de rien. Ou tu vends ta part.

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S'il n'y a pas de contraintes réglementaires particulières, la gestion peut être très simple. C'est 3 lampadaires, 2 parcmètres et deux-trois réparations de temps en temps. Un type motivé peut meme le faire tout seul si la taille est petite.

 

Oh que non... C'est jamais si simple. Va une fois dans un syndic de copro... Il faudra également s'occuper des autorisations de stationnement pour les camions de déménagement, de la couleur du bitume (les gens sont vraiment cons) et tout un tas de machins. Enfin, c'est un syndic et comme tout syndic, ça coûte de l'argent en flux continu ; c'est pas une petite levée de fonds tous les quatre matins.

 

Le système doit également être juridiquement calé par des servitudes (parce que sinon, une fois que tu as vendu tes parts, rien n'interdit la SA de t'interdire l'accès à la rue - parasite !)

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Ou alors le chapitre 15 de Machinery of Freedom de David Friedman (1973).

 

 

Je voulais commander le livre. 60 euros ! Mais que fait l'Etat pour permettre aux plus démunis comme moi d'avoir accès à la culture  :lecon:

 

En fait, c'est rassurant. J'ai acheté l'autobiographie de Richard Branson d'occasion sur Amazon 40 euros, elle est à 70 euros aujourd'hui sur le site. L'Unique et sa Propriété de Stirner en broché est à plus de 50 euros. Tous des livres de qualité et pourtant difficilement accessibles.

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Oh que non... C'est jamais si simple. Va une fois dans un syndic de copro... Il faudra également s'occuper des autorisations de stationnement pour les camions de déménagement, de la couleur du bitume (les gens sont vraiment cons) et tout un tas de machins. Enfin, c'est un syndic et comme tout syndic, ça coûte de l'argent en flux continu ; c'est pas une petite levée de fonds tous les quatre matins.

Le syndic de copropriété à la Francaise c'est une forme bien particulière de propriété. Faut pas prendre ca comme une norme.

Le système doit également être juridiquement calé par des servitudes (parce que sinon, une fois que tu as vendu tes parts, rien n'interdit la SA de t'interdire l'accès à la rue - parasite !)

Les hypothèses nanarcap ne m'intéressent pas.

De façon général ce sont des détails qui regardent les juges.

Si tu ne participes pas à l'augmentation de capital tu te fais diluer. Mais tu peux avoir des actions privilégiées.

Tu pars sur une forme très flexible et à un moment où un autre, il y a une AG des actionnaires et tu discutes augmentation de toutes ces questions.

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Tu es dilué.

Oui mais dans les faits : ta rue s'entretient et s'embellit toute seule sans que tu n'aies à débourser un sou. Même si tu es dilué jusqu'à 0,0001% du pouvoir de décision peu importe (après tout, décider du modèle de banc à installer ou du grain de route...). L'intérêt de l'augmentation de capital dans une société est la promesse de profits futurs, or là c'est une copro avec uniquement des charges (ou presque), donc personne n'a d'intérêt économique à participer à l'augmentation de capital.

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Ils ont le même intérêt économique à avoir une rue propre et en bon état que d'avoir un jardin propre et en bon état. Celui qui paie décide selon ses goûts.

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Ils ont un intérêt économique à avoir une rue en bonne état, mais il n'ont pas d'intérêt économique à participer à son entretien s'il se fait avec ou sans eux.

Si ton jardin s'entretenait tout seul, tu achèterais une tondeuse et dépenserait deux heures de tes week-end ?

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