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Viadeo, les raisons du bide du LinkedIn français


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http://rue89.nouvelobs.com/2015/12/29/viadeo-encore-bide-a-francaise-262643

 

 

Le réseau social professionnel doit fermer sa filiale chinoise, un vrai gouffre financier. Et renoncer largement à ses ambitions internationales, dans un univers dominé par l’Américain LinkedIn. Retour sur les multiples raisons d’un échec .

 

Il vantait sa boîte comme «  une des rares pépites de l’Internet français, une pépite qui se transforme en or  » même, au moment de son introduction à la Bourse de Paris, il y a dix-huit mois. Mais Dan Serfaty, le PDG et cofondateur de Viadeo, n’a finalement pas de talent d’alchimiste et son entreprise, née il y a onze ans, aurait même plutôt du plomb dans l’aile. Le « LinkedIn français » est obligé de renoncer à ses ambitions internationales en fermant sa coûteuse filiale chinoise [PDF], un vrai gouffre.

Les Français, décidément incapables de percer sur le Web  ? Heureusement, de Criteo au BonCoin (racheté en 2010 par le groupe norvégien Schibsted dont son site Blocket avait inspiré le concept) en passant par Vente-privee ou BlaBlaCar, les exemples de réussite ne manquent pas. Dans le cas de Viadeo, l’échec en Chine n’est pas son premier, mais le plus cuisant et celui qui pourrait même lui être fatal. On rapporte que le fondateur de LinkedIn, Reid Hoffman, en lançant son site en France avait balayé la question d’un éventuel rachat d’un terrible :

«  Laissons-le mourir  !  »

Un an et demi après son entrée en Bourse, Viadeo ne vaut plus que 20 millions d’euros, contre 150 millions à l’époque  ! C’est trois fois moins que les 60 millions d’euros qu’elle a levés en cumulé depuis sa création.

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Evolution du cours de Bourse de Viadeo depuis l’introduction - Boursorama

Une dernière comparaison qui fait mal  : son concurrent LinkedIn – fort de ses 400 millions de membres dans le monde – pèse juste 30 milliards de dollars et le numéro deux du marché, l’Allemand Xing 984 millions d’euros....

Retour sur la chronique d’un échec annoncé. Malgré des millions déversés, y compris d’argent public  : le Fonds stratégique d’investissement (devenu Bpifrance) avait investi quelque 10 millions d’euros en 2012.

1
Plantage à l’international

 

Première raison, évidente, le plantage à l’international et singulièrement en Chine. En 2007, Viadeo (qui s’appelait Viaduc au début, mais ça ne faisait pas assez web) a trois ans et se lance dans le rachat de Tianji, «  le premier réseau social professionnel chinois  ». Dan Serfaty y croyait à fond. Il s’est même installé en famille à Pékin quelques années, avait même envisagé d’entrer en Bourse à Hong Kong.

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Capture d’écran de Tianji - Viadeo

Plus de sept ans plus tard, le paysage du Web chinois, très particulier, a été profondément transformé, et Tianji, malgré ses 20 et quelques millions de membres, plus ou moins actifs, ne rapporte rien ou presque à la boîte  : moins d’un million d’euros sur un chiffre d’affaires annuel dans les 20 millions. Du coup, la boîte fermera ce jeudi, le 31 décembre. Joyeux Noël aux 150 et quelques salariés sur place.

 

Avant, Viadeo s’était aussi planté en Inde, et avait dû fermer au bout de trois ans. Son PDG avait expliqué pourquoi cet été sur Atlantico  :

«  Ce marché que l’on pensait être à forte connotation locale était en réalité très américanisé et ouvert sur l’extérieur. Donc des fonctionnalités comme l’accès depuis notre plateforme à l’horoscope, outil indispensable avant tout entretien d’embauche en Inde, devaient en fait bien les faire sourire. On comprend surtout pourquoi notre stratégie ne pouvait pas fonctionner.  »

Dan Serfaty prétend que c’est à cause des investisseurs qui n’ont pas cru en la Chine et ne lui ont pas permis de lever assez d’argent au moment de l’entrée en Bourse, et que Viadeo se retrouve contraint de fermer, dans un marché où il faudrait dépenser massivement en marketing pour sortir du lot. Difficile à avaler alors que Viadeo était présent en Chine depuis 2007...

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Dan Serfaty dans le bureau Viadeo à Pékin, le 29 janvier 2013 - WANG ZHAO/AFP

Et Viadeo a déjà cramé beaucoup de trésorerie là-bas  : dans les 7 à 8 millions d’euros engloutis par an  ! Ça fait beaucoup pour une boîte de cette taille. Pendant ce temps, LinkedIn a signé une joint-venture et annonce plus de 13 millions de membres là-bas.

Avec la fermeture de la Chine, ça ira mieux demain, dit en substance la boîte :

«  En libérant Viadeo du poids financier de Tianji, tant au niveau de la consommation de cash que de l’impact sur le résultat opérationnel, cette décision devrait permettre à Viadeo d’afficher une croissance rentable et durable à moyen terme. »

Dans les autres pays non plus, Viadeo n’a pas vraiment réussi son implantation. Si l’entreprise revendique plus 60 millions de membres, dont 10 millions en France, elle réalise 95% de son chiffre d’affaires dans l’Hexagone plus de dix ans après sa création. Les millions d’inscrits, c’est bien, mais s’ils se connectent peu et n’intéressent ni annonceurs ni recruteurs, quel est l’intérêt  ?

Viadeo s’est dispersé dans tous les sens, tentant sa chance en Europe, dans les Brics, en Afrique francophone, cherchant à se positionner là où LinkedIn n’était pas encore. Quitte à perdre de vue son marché d’origine, la France, où les cadres et CSP+ lui préfèrent son rival américain. Mais aussi l’évolution des attentes des utilisateurs.

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Capture d’écran de la page d’accueil de Viadeo
2
Les abonnements ? Encore raté !

 

Viadeo claironnait dans son document d’introduction en Bourse en juin 2014 disposer d’un «  modèle économique éprouvé  ». Hum  : aujourd’hui, la boîte reconnaît qu’elle doit en réalité se repositionner. On dit «  pivoter  » pour une start-up mais onze ans après sa création et dix-huit mois après l’entrée en Bourse, ça ne fait pas très sérieux.

viadeo_biz_model.jpg
Capture d’écran du document de base - Viadeo

Dans un entretien assez sidérant au Journal du Net au début du mois, Dan Serfaty confie avec une naïveté désarmante que le management était trop occupé par des problèmes techniques de refonte de la plateforme pendant deux ans  :

«  Nous n’avons pas vu que le monde professionnel avait évolué pendant ce laps de temps. »

Et il avoue avoir pris conscience «  juste après l’IPO  », l’entrée en Bourse, qu’il fallait changer de modèle. Aujourd’hui, il faut «  accélérer la transformation du modèle Viadeo, engagée en 2015 par le développement de ses offres B-to-B et la verticalisation de ses services on-line  ».

En clair, laisser tomber le principe de l’abonnement payant pour les utilisateurs (la moitié de son chiffre d’affaires et en chute de 17% sur un an) et faire payer les entreprises recruteuses. Ce qu’a compris très tôt LinkedIn (dont les recettes d’abonnements sont minoritaires).

viadeo_ca.jpg
Chiffre d’affaires de Viadeo à fin septembre 2015
3
Un retard technologique

 

Au-delà des ratages dans le déploiement international et d’un modèle économique pas si pérenne, que penser du site lui-même  ?

Trop franco-français pour les uns, une interface vieillotte, un algorithme de recommandations souvent à côté de la plaque (vous proposant d’entrer en relation avec... votre propre profil par exemple), des bugs à répétition et beaucoup de spams : de multiples relances qui deviennent lassantes, une désinscription compliquée, et pire, des abonnements payants difficiles à supprimer, au point que certains utilisateurs mécontents ont constitué desassociations ou pages Facebook.

Olivier Fécherolle, l’ancien directeur général en charge de la stratégie et du développement, parti cet été chez Oracle, reconnaissait en février «  le retard pris au niveau technologique  » et une plateforme «  à bout de souffle  », dont il a fallu revoir toute l’architecture en 2012.

viadeo_interface.jpg
Capture d’écran de la page d’accueil de Viadeo
4
A court de cash

 

Si Viadeo ferme la Chine, c’est qu’il n’a pas réussi à trouver un repreneur et qu’il veut arrêter l’hémorragie de trésorerie. En Bourse, d’ailleurs, l’action Viadeo a tout de suite remonté, montrant le soulagement des investisseurs de voir cette aventure chinoise soldée.

Mais ce n’est pas tout. Viadeo est sous le coup d’une «  proposition de redressement fiscal  », qu’elle conteste  : le fisc français lui réclame le paiement de l’impôt sur les sociétés et la TVA de 2012 à 2014 pour sa filiale américaine, APVO, qui gère son serveur. Viadeo a d’ailleurs prévu de fermer ce centre serveur en Californie courant 2016. Le montant de l’ardoise n’est pas dévoilé mais Viadeo prévient :

«  Ce redressement pourrait avoir un impact significatif sur les comptes de la société. »

Au premier semestre, Viadeo affichait une perte nette de 6,8 millions d’euros et une trésorerie de 15,9 millions. Mais l’activité en France serait en effet rentable, ou presque.

La suite la plus logique de ce parcours assez désastreux  : se faire racheter par Xing. L’Allemand s’était cassé les dents en France, où il avait dû fermer son bureau. Il a bâti son succès sur les pays germanophones, revendique 9,7 millions de membres et a su se diversifier en rachetant la billetterie d’événements professionnels Amiando, très complémentaire.

En solo, Viadeo pourra-t-il vraiment redorer son blason  ? La rémunération généreuse des dirigeants a fait grincer pas mal de dents  : 1,2 million d’euros au total pour le PDG et le DG délégué en 2012, tout de même abaissée à 836 000 euros en 2013. Assez incompréhensible au vu de la situation de l’entreprise. Mais le tir aurait été corrigé depuis, assure Dan Serfaty. En octobre, le cofondateur vantait son parcours au salon de la micro-entreprise :

 
 
.@dserfaty "Un echec pour un entrepreneur est comme une cicatrice pour un chef de la mafia : c'est une marque de crédibilité." #SalonSME
 

Pas sûr que cette analogie fasse sourire tous ceux qui ont cru dans la boîte.

 

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Les petits journaleux de Rue89 donnent des leçons aux entrepreneurs maintenant...

 

"Un echec pour un entrepreneur est comme une cicatrice pour un chef de la mafia : c'est une marque de crédibilité."

 

C'est la seule chose à retenir.

  • Yea 1
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Les petits journaleux de Rue89 donnent des leçons aux entrepreneurs maintenant...

 

"Un echec pour un entrepreneur est comme une cicatrice pour un chef de la mafia : c'est une marque de crédibilité."

 

C'est la seule chose à retenir.

 

 

Ils avaient fait un autre article tres interessant sur un site americain qui est une sorte de huber de l'aide menagere, qui s'est planté.

J'aime beaucoup ces articles.

Ce n'est donner des lecons, il y a de la vrai information la dedans, des tas d'infos dont je n'avais aucune idee.

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Pas étonnant. Viadeo a une interface toute pourrie qui bug en permanence, les options intéressantes sont toute payantes, les connexions avec les entreprises inexistantes, les gens peu actifs, il y a peu d'interactivité et surtout peu d'infos sur le marché du travail.

Xing est encore pire de mon point de vue

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Pas étonnant. Viadeo a une interface toute pourrie qui bug en permanence, les options intéressantes sont toute payantes, les connexions avec les entreprises inexistantes, les gens peu actifs, il y a peu d'interactivité et surtout peu d'infos sur le marché du travail.

Xing est encore pire de mon point de vue

 

Je ne connais pas du tout Xing, juste de nom. Tu parles allemand?

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Je ne connais pas du tout Xing, juste de nom. Tu parles allemand?

 

Je fus dessus en version française. C'est du même accabit que viadeo. Certains le vendront comme incontournable en Allemagne, Autriche et Suisse alémanique mais de fait, là-bas comme en France avec Viadeo, quelqu'un qui veut voir ton profil fera aussi bien avec Linkedin sans tirer la tronche pour autant.

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Conclusion,grosse prime au premier arrivé!

 

être Coca et non Pepsi,

Mercks plutôt que Poulidor, 

Facebook mieux que ...le facebook-français-que-devaient-lancer-des- étudiants-de-l'école -de-commerce-de-ma-petite-ville-de-province-et-dont-je-ne-me-rappelle-plus-le-nom! 

 

 pas besoin de sortir d'une grande école de commerce pour comprendre cela...

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Facebook mieux que ...le facebook-français-que-devaient-lancer-des- étudiants-de-l'école -de-commerce-de-ma-petite-ville-de-province-et-dont-je-ne-me-rappelle-plus-le-nom! 

 

 

Réseaucampus ? :D :D :D

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Conclusion,grosse prime au premier arrivé!

[...]

 

 pas besoin de sortir d'une grande école de commerce pour comprendre cela...

Moui, et cela a pas mal contribué à la bulle internet des années 2000 de penser que c'est aussi simple que ça.

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Réussir!

 réussir le premier, en effet, et non arriver le premier sur un marché avec un truc pourri

 

 Mais après, tenter d'imiter en moins bien et en franchouille, ou autre déclinaison locale...

 

 

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Réussir!

 réussir le premier, en effet, et non arriver le premier sur un marché avec un truc pourri

 

 Mais après, tenter d'imiter en moins bien et en franchouille, ou autre déclinaison locale...

Là ok.

 

Pour reprendre une phrase à la c..

 

"On préfère toujours l'original à la copie".

 

Même si il y a quelques exceptions.

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Un échec est formateur uniquement si on en comprend bien les raisons et on se remet en question par la suite: je n'ai pas l'impression qu'il ai vraiment tiré les enseignements vu qu'il rejette la faute sur des éléments extérieurs. Et puis c'est vrai pour des startups qui durent 1, 2 ou 3 ans et ferment, mais quand on persiste plus de 10 ans dans l'erreur, ça relève de l'obstination.

 

Sinon je vois encore une fois que BPI France est toujours dans les bons coups: 10 millions d'euros d'argent du contribuable bien investis!

 

Le coup de l'horoscope est assez surréaliste.

  • Yea 1
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Je fus dessus en version française. C'est du même accabit que viadeo. Certains le vendront comme incontournable en Allemagne, Autriche et Suisse alémanique mais de fait, là-bas comme en France avec Viadeo, quelqu'un qui veut voir ton profil fera aussi bien avec Linkedin sans tirer la tronche pour autant.

 

Je le trouve quand même largement moins bien foutu que Linkedin. Super limité/rigide au niveau des informations de profil par exemple, impossible de diverger, de mettre des textes explicatifs ou quoi que ce soit. Je sais que c'est Allemand et donc que tout doit être bien trié dans des petites cases, mais quand même.

Je l'avais découvert par hasard, en achetant un ticket pour un festival à couleur (celui où tout le monde se jette de la poudre multicolore sur la gueule en picolant), ça m'a plutôt surpris de me retrouver inscrit dessus (je croyais que c'était un gestionnaire d'événements), et de voir mes collègues m'y ajouter.  :mrgreen:

 

Mais du coup, Linkedin, c'est pas juste le premier arrivé (est-ce que c'est vraiment le cas d'ailleurs, surtout dans les pays concernés par les équivalents nationaux ?), c'est surtout que c'est de très très loin le mieux foutu. Rien que la gestion des domaines professionnels (groupes, actualités, interactions diverses et personnalités à suivre...) lui donne une dimension de réseau professionnelle qui va bien au delà de la simple recherche de job, c'est ça qu'ils ont compris plus que les autres, et c'est ça qui les rend bien meilleurs.

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Très intéressant de chercher à comprendre les raisons d'un succès comme celle d'un échec.

Perso, je ne comprends toujours pas les raisons du succès de Facebook même s'il semble qu'ils commencent à gagner du pognon, par contre, un réseau pro. comme linkedin, bien foutu ça me semble vraiment plus utile.

L'idéal serait un mix des deux. Un truc pro mais ouvert.

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