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Le Droit Naturel Existe T-Il ?


Messages recommandés

Bonsoir,

 

J'ai récemment eu l'occasion de discuter avec des étatistes du Droit. Pour eux le Droit Naturel n'existe pas. Je dois dire que je n'ai pas réellement su quoi répondre car pour moi c'est évident : chacun possède sa vie et ce qui en découle. Mais pour eux, le droit à la vie n'existe que parce que les autres veulent bien le reconnaître (la société Maïa sacrifiait ses membres par exemple, et ils étaient ravis d'aller se faire arracher le coeur). Que répondre à cela ? Les droits des gens sont-ils des constructions sociales ? Sinon d'où viennent-ils ? Qu'est ce qui me permet de dire "je suis homme donc j'ai des droits" ? L'article de Wikiberal m'a donné quelque pistes mais tout cela reste assez flou.

 

Bien cordialement

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   :qtsd3:

 

Les réponses, c'est par là.

 

C'est mal, mais bon, je vais me citer (paresse et toussa) :



Ils me feront toujours doucettement rire ces positivistes et autres relativistes qui se gaussent du Droit naturel et qui s’imaginent très fins en le brocardant avec le qualificatif de mystique. Pour eux, dire que le Droit naturel résulte de l’effort de la raison pour découvrir le fondement objectif de la distinction entre le bien et le mal, le juste et l’injuste, le droit et le crime, c’est de la mystique, des billevesées de religion révélée.

Par contre, nos sarcastiques relativistes sont très fiers de leur positivisme. Ça, c’est du sérieux, hein. D’ailleurs le nom le dit : c’est positif. Si Ça fait pas scientifique, Ça ! Et pour eux, c’est clair et net, clarinette, le droit, c’est l’ensemble des règles qui autorisent ou prohibent nos comportements selon la volonté des gouvernants ou de la population au travers de la formation d’un consensus. Pif, paf, pouf et pan dans la gueule ! Ça en jette non !? Tous ces termes : règles, comportements, autorisation, gouvernants, population, consensus et tutti quanti. Sauf que…

Sauf que pour adopter la vision de ces positivistes qui se foutent de la gueule des iusnaturalistes en les traitant de mystiques, il faut adhérer aveuglément à une véritable religion où, à chaque pas du raisonnement, on demande aux gens de faire un acte de foi. D’abord, il faut adhérer à la croyance qui voudrait que les gouvernants seraient légitimés à édicter des lois. Ensuite, il faut adopter la croyance selon laquelle ces lois posséderaient une nature obligatoire per se. Enfin, il faut encore se rallier à la croyance qui voudrait que les sanctions qui punissent tout manquement à ces lois seraient nécessaires et légitimes.

Vois-tu, Sloonz, définir le droit comme "l’ensemble des règles générales régissant les rapports des individus dans le cadre d'une société", c’est ne rien définir, c’est seulement faire une description institutionnelle parfaitement simplette qui surnage seulement à la surface des choses et qui rend impossible toute compréhension de la nature du droit. Ainsi, selon ta définition, les législations soviétiques et nazies seraient du droit. Selon ta conception du droit, il était injuste de condamner Adolf Eichmann puisque, à la lumière "des règles générales régissant les rapports des individus dans le cadre" du IIIe Reich, ce dernier n’avait commis aucun crime.

Le droit, selon les positivistes et les relativistes qui rejettent le Droit naturel, c’est l’absence de droit, c’est seulement le règne du plus fort. Certes, c’est violent, et c’est pourquoi ils sont obligés de recourir aux mythes pour nous faire accepter cet état de violence institutionnalisée : le gouvernement peut légitimement faire des lois, il est obligatoire d’obéir à la loi, celui qui n’obéit pas à la loi doit être puni. Et, roulez jeunesse, les Juifs dans les chambres à gaz et les contre-révolutionnaires au goulag. Oui, c’est violent. Et tu auras beau hululer que l’on ne peut pas comparer un régime démocratique à ces régimes totalitaires et patati, que ce n’est pas la même chose et patata, tu auras tort. Car, dès lors que les positivistes et les relativistes fondent le droit à l’intérieur même du cadre la volonté humaine, ce droit qui rejette la Loi naturelle n’est que le règne de l’arbitraire et la loi du plus fort. Et le régime démocratique - où une loi peut être imposée par 51% de la population via ses représentants au 49% restant - est, en essence, tout aussi arbitraire et violent que la pire des tyrannies totalitaires.

Donc, si l’on veut vraiment aller au fond des choses et déterminer la réelle nature du droit, il faut abandonner ces mythes positivistes qui, sous le vernis de la description purement institutionnelle du système juridique, valident l’arbitraire de la loi du plus fort. Alors qu’est-ce que le droit ? Simplement ce qui doit être. Et, dans le cadre juridique, ce qui doit être fait référence aux conditions nécessaires que les êtres humains doivent respecter pour qu’une société humaine puisse survivre, se développer, être le lieu où les hommes puissent s’épanouir le plus possible, bref, être une société humaine digne de ce nom. Or la détermination de ces conditions ne se fonde pas sur la volonté arbitraire des hommes mais sur la compréhension rationnelle de la Loi naturelle qui conforme la vie des êtres humains en société. Ainsi, ce n’est pas par une lubie capricieuse de la volonté humaine que le vol et le meurtre sont prohibés de tout temps dans toutes les civilisations, mais bien parce qu’aucune société humaine ne pourrait survivre dignement si le meurtre et le vol restaient impunis. C’est donc en se fondant sur la Loi naturelle, à l’extérieur de la volonté humaine, que les hommes ont pu déterminer rationnellement que la prohibition et la sanction du meurtre et du vol faisaient partie des conditions naturellement nécessaires pour qu’ils puissent vivre en société de manière la plus épanouie possible, et qu’ils ont ainsi pu définir objectivement la non-agression et la propriété comme des droits naturels qu’il faut respecter.
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L'article de Wikiberal m'a donné quelque pistes mais tout cela reste assez flou.

Pourtant en bas de l'article wikiberal il y a des liens vers des fils de discussions du forum.

 

En complément :

http://www.liberaux.org/index.php/topic/46650-le-fondement-du-droit-naturel/

http://www.liberaux.org/index.php/topic/50517-droit-naturel-droit-de-propriete/

 

Ou encore :

http://jesrad.wordpress.com/justice-proprietarienne/

http://www.dantou.fr/DroitNaturel.html

 

Sinon niveau littérature :

  • Le "Que sais-je ?" sur le Droit naturel d'Alain Sériaux
  • Toute l'oeuvre de Michel Villey, par exemple : La formation de la pensée juridique moderne.
  • Droit naturel et Histoire de Léo Strauss
  • Les premiers chapitre de L'Éthique de la liberté de Murray Rothbard
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Lulu, ça ne te dirais pas, dans tes moments de grande bonté, d'aller améliorer l'article Wikibéral idoine pour le rendre moins abrupt, moins académique ? ;)

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Sinon niveau littérature :

  • Le "Que sais-je ?" sur le Droit naturel d'Alain Sériaux
  • Toute l'oeuvre de Michel Villey, par exemple : La formation de la pensée juridique moderne.
  • Droit naturel et Histoire de Léo Strauss
  • Les premiers chapitre de L'Éthique de la liberté de Murray Rothbard
 

Pour ma part j’ajouterai Le droit naturel, ses amis et ses ennemis.

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"Droit naturel" : en rhétorique, c'est ce qu'on appelle un oxymore - une contradiction dans les termes.

 

Le droit est naturel

La guerre c'est la paix

La liberté c'est l'esclavage

 

Dommage que tant d'éminents libéraux se fourvoient de la sorte.

 

J'ai eu l'occasion de discuter avec des scientifiques. Pour eux un liquide gazeux n'existe pas. Je n'ai pas su quoi leur répondre car pour moi c'est évident : le gaz peut être liquide. A moins que... A moins qu'il s'agisse bien d'une même matière, mais sous différents états ? Enfin, bon, j'ai pas envie de trop étudier la question, je suis sûr d'avoir entendu d'autres personnes bien plus convaincantes parler de liquide gazeux alors je veux plutôt croire à ça ! Du coup, des libéraux pourraient-ils m'aider à dénigrer et à insulter ces scientifiques - qui, en plus, se prétendent "rationnels" !!! Ça, c’est du sérieux, hein. D’ailleurs le nom le dit : c’est rationnel. Comme si les autres ne l'étaient pas...

 

> Une définition à considérer : ce que Hobbes entend par "droit naturel". Quoi qu'on pourrait dire "la nature" tout court dans ce cas. Donc la seule définition cohérente et réelle ?

 

> Un paradoxe à étudier : les très sérieux jusnaturalistes, en découvrant les principes de ce droit si naturel, 100% bio, par le fait même de les formuler, ne basculent-ils pas dans une forme de positivisme ? Le fait même d'énoncer la loi, naturelle ou pas, n'est-ce pas là l'état du droit caractérisé comme positif ?

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"Droit naturel" : en rhétorique, c'est ce qu'on appelle un oxymore - une contradiction dans les termes.

Quelle est la contradiction entre "droit" et "naturel" ?

 

 

Un paradoxe à étudier : les très sérieux jusnaturalistes, en découvrant les principes de ce droit si naturel, 100% bio, par le fait même de les formuler, ne basculent-ils pas dans une forme de positivisme ? Le fait même d'énoncer la loi, naturelle ou pas, n'est-ce pas là l'état du droit caractérisé comme positif ?

 

Droit-positif-et-naturel.png

 

Le positivisme, c'est nier la partie gauche.

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Ah, vous voulez dire que les jusnaturalistes utilisent le terme "naturel" comme ils auraient pu dire "droit rouge" ou "droit biloubiloupe" ? En fait je réagis car "naturel" est un adjectif généralement employé pour désigné "ce qui appartient à la nature". Mais évidemment, si on décide que ça veut dire tout autre chose, ok, ok, déformons le sens des mots, puisque les gauchistes le font, pourquoi pas les libertariens ?

 

Non sérieux, vous répondez à mon message en me donnant la définition jusnaturaliste du droit naturel : ça ne répond à rien, vous êtes piégé dans une forme de circularité, je critique justement le fait d'associer cette définition, ou la "partie gauche" du schéma, à l'expression "droit naturel"...

 

Cela dit le schéma a d'intéressant qu'il indique que le "droit naturel" inspire le droit positif : en réalité, ce qui est désigné par "droit nat" est un ensemble possible du droit positif - devient un ensemble possible du droit positif aussitôt qu'il est énoncé. On ne peut sortir du positivisme - au mieux pourrait-on parler de "positivisme résigné". On peut donc les distinguer dans une certaine mesure, mais les opposer est un non sens - A moins d'envisager cette opposition sur un plan métaphysique. Mais pourquoi la théorie libérale s’embarrasserait-elle de métaphysique ? Elle peut largement se contenter d'être une théorie du droit, et pourrait, de fait, contenter tout le monde, plutôt qu'envisager des divisions là où il n'y en a pas.

 

Pouvez-vous me donner une règle du droit naturel ?

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"Droit naturel" : en rhétorique, c'est ce qu'on appelle un oxymore - une contradiction dans les termes.

 

Le droit est naturel

La guerre c'est la paix

La liberté c'est l'esclavage

 

Dommage que tant d'éminents libéraux se fourvoient de la sorte.

 

J'ai eu l'occasion de discuter avec des scientifiques. Pour eux un liquide gazeux n'existe pas. Je n'ai pas su quoi leur répondre car pour moi c'est évident : le gaz peut être liquide. A moins que... A moins qu'il s'agisse bien d'une même matière, mais sous différents états ? Enfin, bon, j'ai pas envie de trop étudier la question, je suis sûr d'avoir entendu d'autres personnes bien plus convaincantes parler de liquide gazeux alors je veux plutôt croire à ça ! Du coup, des libéraux pourraient-ils m'aider à dénigrer et à insulter ces scientifiques - qui, en plus, se prétendent "rationnels" !!! Ça, c’est du sérieux, hein. D’ailleurs le nom le dit : c’est rationnel. Comme si les autres ne l'étaient pas...

 

> Une définition à considérer : ce que Hobbes entend par "droit naturel". Quoi qu'on pourrait dire "la nature" tout court dans ce cas. Donc la seule définition cohérente et réelle ?

 

> Un paradoxe à étudier : les très sérieux jusnaturalistes, en découvrant les principes de ce droit si naturel, 100% bio, par le fait même de les formuler, ne basculent-ils pas dans une forme de positivisme ? Le fait même d'énoncer la loi, naturelle ou pas, n'est-ce pas là l'état du droit caractérisé comme positif ?

 

Le droit naturel existe-t-il ? La valeur existe-t-elle ? À cette dernière question certains on répondu non, cela a aboutit à des catastrophes ; d'autres ont tendance à confondre la subjectivité de la valeur avec un relativisme de la valeur. On peut décréter que le plomb et l'or aient une équivalence, ce sera complètement faux.

 

Pourquoi est-il inconcevable qu'il puisse y avoir naturellement des rapports humains plus optimaux, préférables, pacifiques ou justes ? Les hommes ont 2 bras, une tête, 2 jambes, un cerveau, doivent manger, boire, se reproduire, se loger, survivre, cela conditionne naturellement certains comportements.

 

Le droit de propriété n'existe que parce qu'un type armé l'a imposé aux autres ? Donc le vol n'existe que parce que ce type a imposé le droit de propriété ?

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"Droit naturel" : en rhétorique, c'est ce qu'on appelle un oxymore - une contradiction dans les termes.

Pourquoi ?

 

> Une définition à considérer : ce que Hobbes entend par "droit naturel". Quoi qu'on pourrait dire "la nature" tout court dans ce cas. Donc la seule définition cohérente et réelle ?

La définition de Hobbes découle de son anthropologie, qui précisément se fonde sur une négation de la nature sociale de l'homme (par opposition à Aristote et son animal politique). C'est un postulat et rien d'autre.

Un postulat pas très réaliste au demeurant si on regarde par exemple du côté de l'éthologie.

 

> Un paradoxe à étudier : les très sérieux jusnaturalistes, en découvrant les principes de ce droit si naturel, 100% bio, par le fait même de les formuler, ne basculent-ils pas dans une forme de positivisme ? Le fait même d'énoncer la loi, naturelle ou pas, n'est-ce pas là l'état du droit caractérisé comme positif ?

Si on prétendait fournir un système de lois parfait clefs en main, peut-être.

 

En fait je réagis car "naturel" est un adjectif généralement employé pour désigner "ce qui appartient à la nature".

Et c'est bien ce qu'il veut dire dans ce contexte. Hint: "nature" est polysémique.

 

Pouvez-vous me donner une règle du droit naturel ?

Le principe de non agression ? La propriété ?

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"Naturel" n'est pas à prendre au sens de "sauvage".

Il s'agit ici de ce qui relève de la nature de l'homme.

Il vaudrait mieux parler aujourd'hui de droit intrinsèque, essentiel, voire émergent.

Il y a la même ambiguïté avec le terme de "ressource naturelle" qui pour le coup veut bien dire "ressource sauvage".

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Ah, vous voulez dire que les jusnaturalistes utilisent le terme "naturel" comme ils auraient pu dire "droit rouge" ou "droit biloubiloupe" ? En fait je réagis car "naturel" est un adjectif généralement employé pour désigné "ce qui appartient à la nature". Mais évidemment, si on décide que ça veut dire tout autre chose, ok, ok, déformons le sens des mots, puisque les gauchistes le font, pourquoi pas les libertariens ?

 

Non sérieux, vous répondez à mon message en me donnant la définition jusnaturaliste du droit naturel : ça ne répond à rien, vous êtes piégé dans une forme de circularité, je critique justement le fait d'associer cette définition, ou la "partie gauche" du schéma, à l'expression "droit naturel"...

 

Cela dit le schéma a d'intéressant qu'il indique que le "droit naturel" inspire le droit positif : en réalité, ce qui est désigné par "droit nat" est un ensemble possible du droit positif - devient un ensemble possible du droit positif aussitôt qu'il est énoncé. On ne peut sortir du positivisme - au mieux pourrait-on parler de "positivisme résigné". On peut donc les distinguer dans une certaine mesure, mais les opposer est un non sens - A moins d'envisager cette opposition sur un plan métaphysique. Mais pourquoi la théorie libérale s’embarrasserait-elle de métaphysique ? Elle peut largement se contenter d'être une théorie du droit, et pourrait, de fait, contenter tout le monde, plutôt qu'envisager des divisions là où il n'y en a pas.

 

Pouvez-vous me donner une règle du droit naturel ?

 

Le droit naturel prétend être le droit qui découle de la nature des choses, qui est intangible immuable et vrai indépendamment d'un contexte, d'une volonté ou d'une pratique. Bref, un droit qui est. Plus "qui appartient à la nature" que ça, je ne vois pas. 

 

Tu ne sembles pas percevoir que ton "positivisme résigné" et ta "théorie du droit" ne permettent de trancher aucun débat de droit positif parce qu'ils ne donnent aucun critère, ou plus exactement, s'ils donnent un critère, il est purement postulé. Le droit naturel lui est ce critère qui n'est pas simplement postulé mais qui est vrai. Dire qu'il y a un droit naturel c'est dire qu'il existe, indépendamment de nous (dans la nature) un juste qui peut se découvrir.

 

Ne pas adhérer à ça c'est adhérer au relativisme absolu, qui est la quasi-antithèse du libéralisme. 

 

On peut discuter à l'envi des complexités à découvrir le droit naturel, mais c'est un autre débat. 

 
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Je suis assez gêné par l'expression "rendre à chacun ce qui lui est ". Elle me paraît incliner vers l'idée de "justice sociale". "Rendre à chacun ce qui lui appartient" est à mes yeux plus correct (mais je ne dis pas que c'est une traduction plus fidèle). Toute l'oeuvre de Michel Villey me semble imprégnée de cette ambiguïté. 

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Je suis assez gêné par l'expression "rendre à chacun ce qui lui est ". Elle me paraît incliner vers l'idée de "justice sociale". "Rendre à chacun ce qui lui appartient" est à mes yeux plus correct (mais je ne dis pas que c'est une traduction plus fidèle). Toute l'oeuvre de Michel Villey me semble imprégnée de cette ambiguïté. 

 

Je trouve la correction pertinente, mais je ne pense pas que Villey soit ambigu sur la maxime (mais je dis ça de mémoire : il me semble que pour lui, cela renvoie à l'activité de juger: le partage des biens -internes ou externes- a déjà eu lieu, les frontières de la propriété sont déjà établies et il s'agit de les reconnaître, et non de les corriger, ce qui reviendrait plutôt à l'équité).

 

Sinon un article de de Jasay sur deux notions de justice qu'on a tendance à confondre, qui me paraît bienvenu et très clair (suum cuique v. to each, according to), et qui ouvre la voie à la confusion entre justice tout court et justice sociale.

 

http://www.dejasay.org/bib_journals_detail.asp?id=56

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Ah, vous voulez dire que les jusnaturalistes utilisent le terme "naturel" comme ils auraient pu dire "droit rouge" ou "droit biloubiloupe" ? En fait je réagis car "naturel" est un adjectif généralement employé pour désigné "ce qui appartient à la nature". Mais évidemment, si on décide que ça veut dire tout autre chose, ok, ok, déformons le sens des mots, puisque les gauchistes le font, pourquoi pas les libertariens ?

 

Non sérieux, vous répondez à mon message en me donnant la définition jusnaturaliste du droit naturel : ça ne répond à rien, vous êtes piégé dans une forme de circularité, je critique justement le fait d'associer cette définition, ou la "partie gauche" du schéma, à l'expression "droit naturel"...

 

Naturel ici désigne bien "ce qui appartient à la nature", ou plus exactement dans ce cas : "ce qui est conforme à la nature humaine".

 

Citons Michel Villey, ça t'aidera peut-être :

Mais analysons tout d'abord le premier moment de l'élaboration du droit : c'est un moment intellectuel, théorique, spéculatif. Pour une partie, le droit procède de l'étude de la nature. Il nous faut essayer de comprendre au nom de quelle philosophie Aristote peut ainsi prétendre tirer du droit de l'observation de la nature, puis suivre, dans la Politique, la mise en oeuvre de cette méthode.

 

Élevés que nous sommes à l'école de la philosophie kantienne, il nous est devenu difficile de concevoir que de l'étude des faits on puisse tirer des conséquences sur ce qui doit être, inférer du Sollen à partir du Sein. Mais c'est que la notion aristotélicienne de nature déborde l'ensemble des « faits », à l'observation desquels se limite la science moderne ; que l' « être », tel que le conçoit la philosophie d'Aristote, est plus que le Sein kantien ; que la méthode d'observation recommandée par Aristote est plus complexe que celle des savants d'aujourd'hui.

 

Aristote est beaucoup trop respectueux du langage spontané du peuple pour ignorer que le mot nature (phusis), de même que le mot droit (dikaion), a plusieurs sens. Ce terme peut désigner d'abord l'ensemble du monde extérieur où il nous est donné de vivre ; or ce cosmos est ordonné, il implique un ordre ; le monde, au regard d'Aristote, est l'oeuvre d'une intelligence, ou plutôt d'un fabricateur artiste (on sait qu'Aristote le comparait aux productions d'un potier, qui façonne l'argile en vue de lui donner une forme.) Le monde n'est pas seulement constitué par ces causes « efficientes », ou par ces causes « matérielles » que seuls les savants modernes gardent le souci d'explorer ; mais encore par des causes « formelles », ou des causes « finales ». Comme le vase du potier, il est formé en fonction d'une finalité. Nous voyons pourquoi le christianisme a volontiers pris à son compte cette philosophie, qui s'accordait à l'idée d'un Dieu créateur.

 

On peut dire aussi que chaque être particulier a une "nature". Et cette nature est ce qu'il dit doit être, sa forme, sa fin, selon le plan de la Nature au sens universel du mot. « La nature de chacun c'est sa fin. » (Aristote, Les politiques.) Pour ce qui est des êtres vivants, il suit de là que leur « nature » n'est pas ce qu'ils sont en fait, au regard de la science moderne. L'homme, par exemple, n'atteint pas immédiatement à la plénitude de son être ; donc sa nature n'est pas vraiment ce qu'il est aujourd'hui en acte, mais plutôt ce qu'il tend à être, ce qu'il est en puissance, c'est-à-dire sa forme, sa fin. Un architecte qui joue au bridge au cours d'une soirée mondaine n'en est pas moins un architecte, non qu'alors il le soit en acte, mais parce qu'il est en puissance de construire des maisons. Ainsi l'être de l'homme n'est point l'enfant vagissant dans ses langes, ni le malade, ni l'infirme, mais plutôt l'adulte parvenu à son parfait développement. Il y a bien plus dans la « nature » des êtres vivants que ce qu'ils sont présentement ; il y a ce qu'ils sont ordonnés à être dans leur entier accomplissement, leur fin, qui serait aussi leur bonheur.

Dans un sens voisin, le mot nature peut aussi désigner ce principe, cette force, cet instinct donné qui, selon cette philosophie, pousse l'être à réaliser sa fin. On se rapproche quelque peu du langage moderne qui, par nature, désigne un donné originaire brut. Mais dans la doctrine d'Aristote, même entendue de cette manière, la notion de nature implique référence aux fins, telle que l'on puisse en inférer des connaissances normatives.

 

L'observation de la nature est donc plus que l'observation des faits de la science moderne. Elle n'est pas neutre et passivement descriptive, elle implique le discernement actif des valeurs.

Reconnaître la nature des êtres suppose que l'on fasse un choix entre phénomènes. Il y a des monstres dans le monde, des choses mal venues à l'être (ainsi que les débris informes que le potier laisse au rebut) : par exemple des plantes mal formées, et qui n'arrivent pas à croître, des moutons qui n'auraient que trois pattes, des frères siamois, des enfants sourds-muets ou aveugles, des malades et des infirmes. La science complète de la nature (qui est aussi une science de l'ordre des causes finales) sait distinguer de ces échecs les êtres sains selon la nature.

Il y a des barbares que l'on voit ne pas parvenir au même degré d'épanouissement de la nature humaine, qu'atteignent au contraire les civilisés ; des familles mal constituées qui n'arrivent pas à assurer la vie, la subsistance du groupe ; des cités vouées à la défaite et à l'anarchie intérieure. Une observation intégrale doit nous conduire à discerner les hommes ou groupements constitués selon le plan de la nature de ces déviations malsaines, comme le naturaliste distingue l'avorton de l'être normal. C'est là distinguer ce qui est juste selon la nature de ce qui est, du même point de vue, mauvais et injuste.

 

 

Cela dit le schéma a d'intéressant qu'il indique que le "droit naturel" inspire le droit positif : en réalité, ce qui est désigné par "droit nat" est un ensemble possible du droit positif - devient un ensemble possible du droit positif aussitôt qu'il est énoncé.

Je crois que tu ne comprends pas ce qu'est le droit naturel. Le droit naturel n'est pas un code.

 

On ne peut sortir du positivisme - au mieux pourrait-on parler de "positivisme résigné". On peut donc les distinguer dans une certaine mesure, mais les opposer est un non sens - A moins d'envisager cette opposition sur un plan métaphysique.

Droit positif et droit naturel ne sont pas opposés tant que le premier se fonde sur le deuxième.

Le positivisme, c'est construire des lois arbitrairement, en fonction des désirs de la majorité, ou du tyran.

 

Mais pourquoi la théorie libérale s’embarrasserait-elle de métaphysique ? Elle peut largement se contenter d'être une théorie du droit, et pourrait, de fait, contenter tout le monde, plutôt qu'envisager des divisions là où il n'y en a pas.

On peut aussi considérer que la vérité est plus importante que la volonté de mettre tout le monde d'accord.

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Je suis assez gêné par l'expression "rendre à chacun ce qui lui est ". Elle me paraît incliner vers l'idée de "justice sociale". "Rendre à chacun ce qui lui appartient" est à mes yeux plus correct (mais je ne dis pas que c'est une traduction plus fidèle). Toute l'oeuvre de Michel Villey me semble imprégnée de cette ambiguïté. 

 

Assez d'accord même si en fait je préférerais encore la formulation "laisser à chacun ce qui lui appartient". Ultimement, il me semble que c'est un peu de ça qu'il s'agit. 

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La définition de Hobbes découle de son anthropologie, qui précisément se fonde sur une négation de la nature sociale de l'homme (par opposition à Aristote et son animal politique). C'est un postulat et rien d'autre.

 

La définition de Hobbes se fonde sur la puissance d'auto-conservation de l'individu, en tant qu'animal calculateur. Hobbes la déduit de la raison, mais l'étaye aussi par l'expérience et de façon très solide.

 

A vrai dire je ne connais pas de meilleure définition du droit naturel, qu'il ne faut pas confondre avec la loi naturelle. Or la nature sociale de l'homme relève de la loi de nature, c'est-à-dire de l'obligation de contracter pour rechercher la paix, et non du droit naturel qui concerne la puissance des individus.   

 

Le DROIT NATUREL, que les auteurs nomment couramment jus naturale, est la liberté que chaque homme a d'user de sa propre puissance comme il le veut pour la préservation de sa propre nature, c'est-à-dire de sa propre vie, et par conséquent de faire tout ce qu'il concevra, selon son jugement et sa raison propres, être le meilleur moyen conforme à cette fin.

 

C'est pourquoi il est inconcevable qu'un homme ait pu, par des paroles ou d'autres signes, abandonner ou transmettre certains droits. D'abord, un homme ne peut pas se démettre du droit de résister à ceux qui l'attaquent par la force pour lui ôter la vie, parce qu'il est inconcevable qu'il vise de cette façon quelque bien pour lui-même. On peut dire la même chose pour les blessures, les fers, l'emprisonnement, parce que d'une part, il n'y a aucun avantage consécutif au fait d'endurer ces choses, comme il y en a au fait de souffrir qu'un autre soit blessé ou emprisonné, et d'autre part parce qu'un homme, quand il voit des hommes agir avec violence à son égard, ne peut pas dire s'ils projettent ou non sa mort.

 

Leviathan, XIV : De la première et de la seconde lois naturelles, et des contrats

 

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En revanche ce que je ne comprends pas dans l'histoire du droit c'est que le droit naturel doit forcément être positivé pour être applicable, non ?

Du coup le droit positif n'est que la mise en application du droit naturel ? ( qui échoue parfois, hein)

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En revanche ce que je ne comprends pas dans l'histoire du droit c'est que le droit naturel doit forcément être positivé pour être applicable, non ?

Du coup le droit positif n'est que la mise en application du droit naturel ? ( qui échoue parfois, hein)

 

Le droit positif pourrait être la mise en application du droit naturel. Souvent il est la mise en application de tout autre chose. Mais oui, un droit positif est nécessaire pour faire respecter le droit naturel.

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Si par droit positif on entend un ensemble de lois qu'une institution fera respecter par la force, pas sûr qu'un droit positif soit nécessaire partout et tout le temps pour faire respecter le droit naturel.

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Si par droit positif on entend un ensemble de lois qu'une institution fera respecter par la force, pas sûr qu'un droit positif soit nécessaire partout et tout le temps pour faire respecter le droit naturel.

 

Je ne sais pas ce que tu entends par "partout et tout le temps". Si tu veux dire que le droit naturel est largement respecté spontanément quand l'Etat ne s'en mêle pas, tu as évidemment raison. Mais il existera toujours des conflits et des arbitrages ayant force exécutoire seront toujours nécessaires, même dans un environnement anarcap. 

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Je ne sais pas ce que tu entends par "partout et tout le temps". Si tu veux dire que le droit naturel est largement respecté spontanément quand l'Etat ne s'en mêle pas, tu as évidemment raison. Mais il existera toujours des conflits et des arbitrages ayant force exécutoire seront toujours nécessaires, même dans un environnement anarcap. 

 

Merci!

J'ai eu une (longue) discussion avec un anarcap sur ce sujet, il m'affirmait que ces deux droits étaient opposés. Un contrat en Anarcapie est du droit positif ?

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Je ne sais pas ce que tu entends par "partout et tout le temps". Si tu veux dire que le droit naturel est largement respecté spontanément quand l'Etat ne s'en mêle pas, tu as évidemment raison. Mais il existera toujours des conflits et des arbitrages ayant force exécutoire seront toujours nécessaires, même dans un environnement anarcap. 

 

Pour reprendre Jesrad :

 

"Dans le domaine du commerce maritime, comme les gens qui font affaire évoluent à peu de choses près « en dehors de toute législation commune » ils sont en pratique presque entièrement exempts de droit positif quand ils établissent des contrats entre eux. C’est pour cela que, dans ce domaine, c’est principalement le droit naturel qui s’applique (et en cas de litige, son compagnon l’arbitrage privé qui tranche). On trouve alors des choses comme la responsabilité de l’affréteur envers l’armateur si son chargement endommage le navire, la créance au pro-rata du temps de retard sur une course, et des tas d’autres petites choses que les gens font parce qu’ils savent que c’est ce qu’il est juste de faire.

De même, dans le champ du marché noir les acteurs étant hors la loi, il ne reste entre eux que le droit naturel pour régir leurs interactions. On y trouve pourtant des garanties, des engagements sur les délais, et toutes sortes d’autres notions de bon droit. On peut même y voir des banques complètes y fonctionner de manière tout à fait normale, en dehors de toute législation et de l’appareil exécutif de l’état."

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Je trouve la correction pertinente, mais je ne pense pas que Villey soit ambigu sur la maxime (mais je dis ça de mémoire : il me semble que pour lui, cela renvoie à l'activité de juger: le partage des biens -internes ou externes- a déjà eu lieu, les frontières de la propriété sont déjà établies et il s'agit de les reconnaître, et non de les corriger, ce qui reviendrait plutôt à l'équité).

 

Justement, il me semble (de mémoire, également) qu'il n'est pas toujours très clair sur l'existence d'un "partage" préalable qu'il conviendrait seulement de rétablir. Je crois me rappeler qu'il présente parfois la mission du juge de cette façon, mais il me semble aussi que d'autres fois il revient, en contrebande, à l'idée que le rôle de la justice serait de dessiner ou découvrir un partage respectant les justes "rapports".  

 

Voir, notamment, son insistance sur la différence entre les approches réalistes et nominalistes de la justice (ou de la cité). De l'idée (correcte, à mon sens) que le droit n'a de sens qu'à l'intérieur d'une cité (ou du moins que dans les rapports entre humains), on glisse facilement à une conception holiste du droit. L'emploi du terme "chacun" (rendre à chacun...) va aussi dans ce sens.

 

Assez d'accord même si en fait je préférerais encore la formulation "laisser à chacun ce qui lui appartient". Ultimement, il me semble que c'est un peu de ça qu'il s'agit. 

 

Comme définition du "juste" ou de la "justice", ça me va parfaitement. Cependant, si l'on cherche à définir l'office du juge (ce qui semble être le but principal de Villey), cela ne convient plus. Par hypothèse, le juge sera souvent amené à rendre à un justiciable (à un justiciable et non plus à "chacun") ce qui lui a a été enlevé par un acte injuste. J'ai l'impression que Villey alterne parfois entre ces deux acceptions du concept de "justice".

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"Droit naturel" : en rhétorique, c'est ce qu'on appelle un oxymore - une contradiction dans les termes.......................

 

Bla bla sémantique.

 

> Un paradoxe à étudier : les très sérieux jusnaturalistes, en découvrant les principes de ce droit si naturel, 100% bio, par le fait même de les formuler, ne basculent-ils pas dans une forme de positivisme ? Le fait même d'énoncer la loi, naturelle ou pas, n'est-ce pas là l'état du droit caractérisé comme positif ?

 

Tu ne comprend pas. Le jusnaturalisme revient à considérer qu'il existe un droit objectivement bon. Le positiviste lui se contente de décrire concrètement le droit sans chercher ce qui est juste, c'est un nihiliste, et un emmerdeur comme tous les nihilistes.

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En revanche ce que je ne comprends pas dans l'histoire du droit c'est que le droit naturel doit forcément être positivé pour être applicable, non ?

Du coup le droit positif n'est que la mise en application du droit naturel ? ( qui échoue parfois, hein)

 

Non, il peut exister des lois qui ne sont pas la transposition écrite du droit naturel et qui, à la fois, n'y sont pas contraires. Par exemple : une loi qui dispose que l'on doit rouler à droite. C'est tout à fait arbitraire mais ça ne va pas à l'encontre du droit naturel.

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