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Ordre spontané et constructivisme


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Bonjour, bonsoir, selon l'heure à laquelle vous lisez :icon_up:

Voilà je me suis découvert libéral il y a maintenant environ un mois. Je ne vais pas y aller par quatre chemins, avant j'étais très nationaliste, identitaire, et conservateur.

Seulement voilà, je n'ai en fait pas changé mes valeurs. J'ai seulement compris le sens du libéralisme, et le sens de mes propres idéaux. J'ai construit moi-même une vision du libéralisme, dans lequel tout est guidé par nos valeurs, considérant que l'humain est fait pour faire spontanément ce dont pourquoi il est fait (vous me suivez :doigt: ) et qu'il faut donc laisser la "nature" faire le choses, c'est-à-dire que, spontanément, l'Homme façonnera sa société légitime et naturelle.

Je me suis aujourd'hui penché vers un aspect qu'Hayek avançait : celui de l'Ordre spontané, en opposition au constructivisme. J'ai l'impression que les deux vont de pair, ou alors je n'ai rien compris, c'est là ma question en fait.

Si l'Ordre spontané dit que l'ordre se fera spontanément par consensus de chaque individu, ne peut-on pas dire que l'humain a donc des valeurs pré-existantes qui le guident automatiquement vers cet ordre, sans besoin de coercition étatique? Car Hayek dit que l'Homme est imprévisible, et que donc l'Ordre se fera de façon aléatoire et imprévisible.

Moi je pense que nous avons des valeurs assez communément partagés qui fondent les idéaux individuels, familiaux et sociétaux, et que nous sommes donc prévisibles, au moins pour une culture donnée, et que c'est ça qui fonde l'Ordre spontané, pour le coup "construit" et non imprévisible.

J'ai été long désolé. Mais j'ai envie de savoir si ma vision est erronée, ou si j'ai compris et qu'elle peut être plausible. Merci !

Edit : je parle biensur d'un constructivisme non-étatique, uniquement philosophique

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Seulement voilà, je n'ai en fait pas changé mes valeurs. J'ai seulement compris le sens du libéralisme, et le sens de mes propres idéaux. J'ai construit moi-même une vision du libéralisme, dans lequel tout est guidé par nos valeurs, considérant que l'humain est fait pour faire spontanément ce dont pourquoi il est fait (vous me suivez :icon_up: ) et qu'il faut donc laisser la "nature" faire le choses, c'est-à-dire que, spontanément, l'Homme façonnera sa société légitime et naturelle.

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Si l'Ordre spontané dit que l'ordre se fera spontanément par consensus de chaque individu, ne peut-on pas dire que l'humain a donc des valeurs pré-existantes qui le guident automatiquement vers cet ordre, sans besoin de coercition étatique? Car Hayek dit que l'Homme est imprévisible, et que donc l'Ordre se fera de façon aléatoire et imprévisible. (…)

Hayek ne défend pas une vision "fixiste" de la société : les institutions et les normes ne s'ajustent pas spontanément à la nature éternelle et immuable de l'individu, et ses valeurs ne sont pas gravées dans le marbre une bonne fois pour toute pour répondre à toutes les circonstances du moment. Le débat entre nature et culture est vite résolu chez lui par une forme de spinozisme qui fait de l'homme un être naturellement porté à faire des conventions.

En bon disciple de Burke et surtout de David Hume, sa vision est historiciste et évolutionniste : les normes, valeurs et habitudes ne valent que comme règles cognitives pour se comporter dans un système d'interactions entre individus trop complexe pour être saisi par un seul homme. Du coup, les valeurs changent aussi en fonction du raffinement dans la division du travail : à la société archaïque (qu'Hayek appelle ordre tribal) correspond une morale et des habitus très communautaires (une morale de "vis-à-vis"), à celle de la grande société qui institue les règles de justice, c'est-à-dire la propriété, son transfert et la réparation des torts en cas de non respect des deux premières règles, correspond des règles de juste conduite abstraites, c'est-à-dire applicables bien au delà du cercle étroit de la famille ou de la petite communauté.

Les habitudes, les conventions, la civilisation pour la tradition de l'ordre spontané sont des sortes de raccourcis formalisés pour accéder aux informations essentielles nécessaires à l'évolution dans un monde totalement opaque et imprévisible.

Le constructivisme est la position exactement contraire sur le plan épistémologique, normatif et descriptif à celle de l'ordre spontané. Il part du principe qu'une fois connus les premiers principes au coeur du monde social, il est possible de le rectifier, de le corriger et même de le reconstruire essentiellement. C'est une forme de rationalisme dévoyé. Il désigne une croyance commune à tous les planistes, ingénieurs sociaux, pseudos experts et autres démiurges qui pensent pouvoir améliorer le sort de l'humanité en la réorganisant selon leurs voeux. Nb : Hayek tend à prêter à Descartes et à ses successeurs un tel constructivisme. Il a bien tort, et son hostilité à la philosophie française l'empêche de voir qu'elle est tout aussi anglo-saxonne que ses chères idoles. En effet, les Hobbes et les Locke dans le domaine se posent là.

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Je me demande s'il ne serait pas pertinent de lire l'œuvre de Hayek et, en particulier, sa théorie de l'évolution culturelle (des règles comportementales), en utilisant l'utopie de Nozick (1974). Si oui, alors, selon Hayek, les hommes pourraient vivre sous les règles de conduite qu'ils souhaitent (et, en l'occurrence, identitaires). Mais à condition qu'il n'usent pas de la coercition, c'est-à-dire qu'ils ne forcent pas les autres à appliquer les mêmes règles qu'eux. Chaque communauté vit dans ses règles, et les meilleures se propagent, mais pas par la violence : par l'imitation ou la migration.

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Hayek ne défend pas une vision "fixiste" de la société : les institutions et les normes ne s'ajustent pas spontanément à la nature éternelle et immuable de l'individu, et ses valeurs ne sont pas gravées dans le marbre une bonne fois pour toute pour répondre à toutes les circonstances du moment. Le débat entre nature et culture est vite résolu chez lui par une forme de spinozisme qui fait de l'homme un être naturellement porté à faire des conventions.

En bon disciple de Burke et surtout de David Hume, sa vision est historiciste et évolutionniste : les normes, valeurs et habitudes ne valent que comme règles cognitives pour se comporter dans un système d'interactions entre individus trop complexe pour être saisi par un seul homme. Du coup, les valeurs changent aussi en fonction du raffinement dans la division du travail : à la société archaïque (qu'Hayek appelle ordre tribal) correspond une morale et des habitus très communautaires (une morale de "vis-à-vis"), à celle de la grande société qui institue les règles de justice, c'est-à-dire la propriété, son transfert et la réparation des torts en cas de non respect des deux premières règles, correspond des règles de juste conduite abstraites, c'est-à-dire applicables bien au delà du cercle étroit de la famille ou de la petite communauté.

Les habitudes, les conventions, la civilisation pour la tradition de l'ordre spontané sont des sortes de raccourcis formalisés pour accéder aux informations essentielles nécessaires à l'évolution dans un monde totalement opaque et imprévisible.

Le constructivisme est la position exactement contraire sur le plan épistémologique, normatif et descriptif à celle de l'ordre spontané. Il part du principe qu'une fois connus les premiers principes au coeur du monde social, il est possible de le rectifier, de le corriger et même de le reconstruire essentiellement. C'est une forme de rationalisme dévoyé. Il désigne une croyance commune à tous les planistes, ingénieurs sociaux, pseudos experts et autres démiurges qui pensent pouvoir améliorer le sort de l'humanité en la réorganisant selon leurs voeux. Nb : Hayek tend à prêter à Descartes et à ses successeurs un tel constructivisme. Il a bien tort, et son hostilité à la philosophie française l'empêche de voir qu'elle est tout aussi anglo-saxonne que ses chères idoles. En effet, les Hobbes et les Locke dans le domaine se posent là.

Je suis d'accord sur le fait que les normes et habitudes ne sont pas nécessairement spontanément issues de la nature humaine. Celles-ci peuvent être le fruit de l'éducation, de la manipulation, ou autre. Il existe cependant des valeurs naturelles qui se retrouveront le plus exaltées lorsque l'Homme sera en état de liberté totale, comme a dit un philosophe allemand dont j'ai totalement oublié le nom (désolé) "L'Homme retrouvera le plus son humanité lorsqu'il retrouvera le plus sa liberté". En gros plus l'Homme est libre, plus il se comporte "naturellement" et donc humainement.

Si je peux être plus clair : il existe des valeurs fondamentales innées qui façonnent les éléments les plus basiques de nos cognitions. Ces valeurs sont logiquement liées entre elles et forment une éthique naturelle, qui donnera naissance à des règles, des normes, et autres, qui seront tout simplement des "valeurs" plus précises et concrètes, des applications simples à la vie dans l'environnement.

Cependant, ces règles, peuvent être faussées, dénaturées, ou volontairement altérées selon les circonstances, et ainsi ne pas correspondre aux valeurs naturelles fondamentales.

C'est en fait une des raisons pour lesquelles je défends la liberté. Celle-ci permettra aux Hommes de laisser leurs valeurs naturelles fonder leurs règles, normes et habitudes. Il s'agira alors d'une exaltation de la Nature de l'Homme.

Pour ce qui est du constructivisme, je pense mal comprendre. Je croyais qu'il s'agissait du simple concept que l'Homme n'est pas totalement imprévisible, et qu'il existerait toujours une base commune à ses normes, filtrées par les valeurs naturelles. Visiblement il s'agirait plutot de la volonté de refaire une sorte d'Homme "parfait" … ça me plait pas trop :icon_up:

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Je me demande s'il ne serait pas pertinent de lire l'œuvre de Hayek et, en particulier, sa théorie de l'évolution culturelle (des règles comportementales), en utilisant l'utopie de Nozick (1974). Si oui, alors, selon Hayek, les hommes pourraient vivre sous les règles de conduite qu'ils souhaitent (et, en l'occurrence, identitaires). Mais à condition qu'il n'usent pas de la coercition, c'est-à-dire qu'ils ne forcent pas les autres à appliquer les mêmes règles qu'eux. Chaque communauté vit dans ses règles, et les meilleures se propagent, mais pas par la violence : par l'imitation ou la migration.

C'est comme ça que je l'ai toujours lu, sa défense de la société ouverte n'est pas une obligation constructiviste de société ouverte universelle, juste la prédiction que c'est les sociétés ouvertes qui vont 'gagner'

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Je me suis aujourd'hui penché vers un aspect qu'Hayek avançait : celui de l'Ordre spontané, en opposition au constructivisme. J'ai l'impression que les deux vont de pair, ou alors je n'ai rien compris, c'est là ma question en fait.

Si l'Ordre spontané dit que l'ordre se fera spontanément par consensus de chaque individu, ne peut-on pas dire que l'humain a donc des valeurs pré-existantes qui le guident automatiquement vers cet ordre, sans besoin de coercition étatique? Car Hayek dit que l'Homme est imprévisible, et que donc l'Ordre se fera de façon aléatoire et imprévisible.

Je ne sais pas si j'ai bien compris le fond de ta pensée, mais il me semble qu'en ce qui concerne par exemple l'étude des systèmes complexes, on a justement pas besoin d'une information préexistante ayant un quelconque rapport avec l'ordre vers lequel le système va tendre. En gros, bien que l'information n'existe pas à l'échelle individuelle, il se produira une synergie qui aura pour effet que la complexité de l'ensemble (ou l'effet qu'il produira) sera supérieure à la somme des complexités individuelles (ou somme des effets obtenus individuellement). C'est comme si l'information n'existait pas à l'échelle individuelle mais qu'elle émergeait à l'échelle du groupe. Le cas des fourmis/termites/abeilles etc… est un bon exemple.

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Je ne sais pas si j'ai bien compris le fond de ta pensée, mais il me semble qu'en ce qui concerne par exemple l'étude des systèmes complexes, on a justement pas besoin d'une information préexistante ayant un quelconque rapport avec l'ordre vers lequel le système va tendre. En gros, bien que l'information n'existe pas à l'échelle individuelle, il se produira une synergie qui aura pour effet que la complexité de l'ensemble (ou l'effet qu'il produira) sera supérieure à la somme des complexités individuelles (ou somme des effets obtenus individuellement). C'est comme si l'information n'existait pas à l'échelle individuelle mais qu'elle émergeait à l'échelle du groupe. Le cas des fourmis/termites/abeilles etc… est un bon exemple.

+1

Non seulement, on n'a pas besoin d'une information préexistante, mais encore, elle n'existe pas et elle ne peut pas exister. Cette information est détenue dans le destin inconnu de chacun des participants à la société.

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Je suis d'accord sur le fait que les normes et habitudes ne sont pas nécessairement spontanément issues de la nature humaine. Celles-ci peuvent être le fruit de l'éducation, de la manipulation, ou autre. Il existe cependant des valeurs naturelles qui se retrouveront le plus exaltées lorsque l'Homme sera en état de liberté totale, comme a dit un philosophe allemand dont j'ai totalement oublié le nom (désolé) "L'Homme retrouvera le plus son humanité lorsqu'il retrouvera le plus sa liberté". En gros plus l'Homme est libre, plus il se comporte "naturellement" et donc humainement.

Si je peux être plus clair : il existe des valeurs fondamentales innées qui façonnent les éléments les plus basiques de nos cognitions. Ces valeurs sont logiquement liées entre elles et forment une éthique naturelle, qui donnera naissance à des règles, des normes, et autres, qui seront tout simplement des "valeurs" plus précises et concrètes, des applications simples à la vie dans l'environnement.

Cependant, ces règles, peuvent être faussées, dénaturées, ou volontairement altérées selon les circonstances, et ainsi ne pas correspondre aux valeurs naturelles fondamentales.

C'est en fait une des raisons pour lesquelles je défends la liberté. Celle-ci permettra aux Hommes de laisser leurs valeurs naturelles fonder leurs règles, normes et habitudes. Il s'agira alors d'une exaltation de la Nature de l'Homme.

Pour ce qui est du constructivisme, je pense mal comprendre. Je croyais qu'il s'agissait du simple concept que l'Homme n'est pas totalement imprévisible, et qu'il existerait toujours une base commune à ses normes, filtrées par les valeurs naturelles. Visiblement il s'agirait plutot de la volonté de refaire une sorte d'Homme "parfait" … ça me plait pas trop :icon_up:

Est-ce que ce qui existe de l'homme à l'état "naturel" ne sont pas les règles sélectionnées par l'évolution pour assurer la pérennité d'un groupe animal ? Par exemple, on ne détruit pas un congénère de l'espèce gratuitement, ça coûte des ressources et ça mène à la disparition du groupe. Ou comme autre exemple l'équilibre qui s'établit entre quantité de proies et de chasseurs (si plus de proies disponibles => le nombres de chasseurs augmente car il y a assez de proies pour les nourrir, si trop de chasseurs => moins de proies, les chasseurs surnuméraires meurent, et ainsi de suite).

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Invité Arn0

http://www.laviedesidees.fr/L-economie-sel…arl-Menger.html

Menger oppose de ce point de vue ce qu’il appelle les institutions « organiques » aux institutions « pragmatiques ». Ces dernières sont des règles et des organisations qui sont le produit d’une action collective concertée et planifiée. Elles sont le résultat d’un dessein consciemment développé par un ou plusieurs individus. À l’inverse, les institutions organiques sont le produit non intentionnel d’actions individuelles intentionnelles. Autrement dit, une institution organique est une conséquence sociale (collective) non anticipée, voire non voulue, qui résulte des actions entreprises par plusieurs individus. Pour Menger, de nombreux phénomènes sociaux résultent de ce type de processus : le droit, le langage, le marché ou la monnaie sont tous des institutions au moins partiellement organiques.

À sa façon, Menger reprend à son compte l’analyse développée par les philosophes des « lumières écossaises », à commencer par David Hume et Adam Smith. Les institutions organiques sont en effet le produit d’une « main invisible ». Par rapport à Hume et Smith, l’économiste autrichien va s’employer à préciser les mécanismes sous-jacents à l’émergence de ces institutions. Dans son article « On the Origins of Money » (1892), Menger s’attache ainsi à remettre en cause l’idée reçue (et très populaire à l’époque au sein de l’école historique allemande) selon laquelle la monnaie est un pur produit de la loi, elle-même résultant de la volonté des gouvernements. D’après cette dernière, la monnaie ne devrait son existence qu’au fait que les États garantissent sa valeur d’échange. Menger oppose à cette théorie une explication « génétique » (que l’on qualifierait aujourd’hui « d’évolutionnaire ») consistant à montrer comment la monnaie, en tant que moyen d’échange universellement accepté au sein d’une communauté, a pu progressivement émerger au travers de la recherche par chaque individu de son intérêt personnel.

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